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Ces carences qui alourdissent le fardeau financier des entreprises
Date: January 1, 1970
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Dans une récession, «cash is king», aiment dire les spécialistes. En d’autres mots, les opérateurs doivent rester très près de leurs sous. Le cash-flow est sous forte tension car les ventes sont en chute et il y a des risques que les débiteurs ne paient pas pour les biens et services achetés à crédit.
Les banques sont très sollicitées pour pallier aux problèmes de trésorerie. Des sociétés font aussi appel aux plans de sauvetage mis en place par le gouvernement sous le Mechanism for Transitional Support to Private Sector (MTSP). Les banques ont un rôle crucial à jouer pour aider leurs clients à traverser cette phase délicate. Mais les compagnies peuvent néanmoins disposer d’une bonne marge de manœuvre pour essayer de s’en sortir sans l’aide de parties tierces.
La première priorité est de dégager des liquidités à brève échéance. «Il faut d’abord renforcer la collecte de l’argent auprès des débiteurs et s’assurer qu’il n’y ait pas de perditions dans la chaîne de revenus. Il faut récupérer l’argent à temps auprès des débiteurs et assurer des paiements à temps aux créditeurs. En même temps, il faut s’assurer qu’on n’achète pas plus qu’il n’en faut et qu’on gère bien son stock», explique Afsar Ebrahim, partenaire chez BDO De Chazal du Mée (DCDM). «Tout dépend de la manière dont l’entreprise gère ses fonds de roulement (working capital)», ajoute-t-il.
Déjà, lorsque le profil des liquidités d’une compagnie ne suit plus ses opérations, les fondamentaux du business commencent à fléchir. Pour les banquiers en tout cas, ces signes sont riches en enseignement. «Le client (l’entreprise) se retrouve avec un niveau de débiteurs élevé en raison des factures impayées pendant de longues périodes. Nous gardons un œil vigilant sur la période de collecte de recettes, de même que celle des provisions faites pour les mauvaises créances», indique Padmini Lareine, Corporate Account Executive à la Mauritius Commercial Bank (MCB).
Les fonds de roulement servent à combler le décalage entre les rentrées d’argent et les décaissements découlant de l’activité de l’entreprise. Les besoins en fonds de roulement (BFR) deviennent un enjeu critique, surtout dans un scénario où le client achète à crédit. Si la période de crédit accordée aux clients est plus longue que celle consentie par les fournisseurs des matières premières (dans le cas d’une activité manufacturière) à la compagnie, celle-ci se retrouve avec des BFR négatifs qui sont généralement financés par des découverts bancaires (overdrafts).
Encore faut-il trouver le montant optimal du working capital pour ne pas alourdir les charges financières de la compagnie. Afsar Ebrahim, expert en corporate finance, fait état d’un certain amateurisme dans la gestion de ce poste chez de nombreux opérateurs mauriciens. Le point de départ pour tout opérateur est de chiffrer ses besoins en financement à court terme pour éviter un recours abusif aux facilités bancaires.
Les conditions attachées à l’obtention des découverts bancaires ont évolué avec le temps. Si auparavant les entreprises pouvaient lever ce genre de capitaux simplement en offrant des garanties aux banques, tel n’est pas nécessairement le cas de nos jours. Aujourd’hui, pour convaincre son banquier, il faut présenter un plan de working capital qui corresponde au cycle de l’activité de la compagnie. Par exemple, les BFR augmentent lorsqu’une entreprise manufacturière achète des matières premières et lorsqu’elle est en train de les convertir en produits finis. Au moment de l’acheminement des marchandises vers les clients, ces besoins devraient diminuer. Or, au lieu de fluctuer selon les étapes de la production, le niveau des fonds de roulement est souvent inchangé. Ce qui suggère que les facilités bancaires pour couvrir les trous de liquidités ne sont pas utilisées à bon escient.
Tout surendettement met encore plus de stress sur les finances des compagnies déjà en difficulté avec la crise. Mais la tentation de lever des dettes pour financer le business ne se limite pas au working capital uniquement. C’est la structure financière même de l’organisation qui demande une certaine remise en question, à plus forte raison dans un contexte où les ventes s’essoufflent.
Les entreprises mauriciennes ont généralement un taux d’endettement (proportion de dettes par rapport aux fonds propres) relativement élevé. Si en période de forte croissance, cela ne pose pas de problème, en temps de vaches maigres, le service de la dette est fortement contrarié. «Lorsqu’une compagnie a un taux d’endettement élevé, les risques financiers viennent s’ajouter aux risques de business (des risques liés au métier de l’opérateur). C’est souvent trop de risques à gérer en même temps. Si la structure du capital n’est pas raisonnable, l’entreprise ne dispose pas d’une bonne marge pour amortir les chocs dans une récession», rappelle Afsar Ebrahim.
Ces symptômes sont suivis de près par les banques qui sont, du reste, très sollicitées en période de stagnation et de déclin économique. L’accompagnement des banques en ces moments d’angoisse et d’incertitude est vital pour naviguer dans les eaux troubles avec le moins de casse possible. Les dossiers des clients en difficulté doivent passer plusieurs tests avant qu’ils n’aboutissent à un plan de financement. «Nous passons en revue les fondamentaux de la compagnie et essayons de comprendre les causes de sa mauvaise performance. Nous examinons par la suite la pertinence et l’efficacité des mesures prises par la compagnie pour répondre aux manquements identifiés. Si nous sommes satisfaits que l’entreprise a de bonnes chances de se ressaisir après la récession, nous mettons certaines facilités à sa disposition», explique Padmini Lareine.
Ces facilités, selon elle, peuvent inclure le rééchelonnement des dettes, des moratoires sur le remboursement du capital et d’autres formes d’assouplissement des conditions de l’emprunt. «Ces facilités sont disponibles seulement s’il y a une indication claire que les actionnaires, le management, les fournisseurs et les autres agences financières concernées vont aussi partager le fardeau», spécifie-t-elle. «La banque peut aussi exiger l’injection de fonds propres frais. Nous essayons aussi d’identifier des actifs non critiques de la compagnie qui puissent être vendus pour alléger l’endettement. D’autres opportunités de financement tels le crédit bail et le factoring peuvent être explorées», soutient la Corporate Account Executive de la MCB.
Akilesh Roopun est rédacteur en chef adjoint d’un magazine économique à Maurice. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links qui apporte des perspectives nouvelles à l’actualité quotidienne.
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