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Cessons de pratiquer la politique de l’autruche
Date: January 1, 1970
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La photojournaliste avait certainement des raisons valables pour commettre un tel acte. Mais malheureusement, elle l’a payé de sa vie. Nous ne sommes plus en 1838, année de la promulgation de la législation sur l’avortement. Nous avons 171 années de retard à rattraper. Il est grand temps maintenant de regarder «les dangers qui guettent la femme utilisant des méthodes risquées pour interrompre une grossesse non-désirée», comme le dit si bien le Dr. Zeenat Aumeerally, gynécologue et obstétricienne.
Essayons de regarder la vérité en face. Cette autre vérité que nous abordons rarement. Danièle Babooram, rédactrice en chef de la Vie Catholique, a raison quand elle dit que l’avortement est un problème qui nous concerne tous, indistinctement. Et elle n’a pas peur de parler de «l’inégalité des rapports homme/femme et la déresponsabilisation de l’homme dans la gestion de sa sexualité». Sheila Bappoo, la ministre de la Sécurité sociale, va dans le même sens quand elle fait état d’une politique de «recherche familiale plus audacieuse pour permettre au couple de vivre dans la liberté et la responsabilité, leur sexualité.»
Cessons de montrer les autres du doigt. Nous sommes tous à blâmer. Il faut faire une campagne de sensibilisation, non seulement sur l’importance de l’éducation sexuelle mais aussi sur l’importance pour les femmes de contrôler leurs corps. Malheureusement, dans bien des cas, ce corps ne leur appartient pas.
Un mari violent, qui rentre à la maison après une bonne cuite, force sa femme à avoir une relation sexuelle avec lui. Et quand la femme refuse, que se passe-t-il ? Il lui met un couteau sous la gorge. Impuissante, elle n’a d’autres choix que de se laisser violer. Et sodomiser.
C’est cela le viol dans le mariage. La femme ne peut même pas demander à son mari d’enfiler une capote. Elle n’a pas non plus de préservatif car elle ne sait même pas que le préservatif féminin existe. Et même si elle le savait, elle n’aurait pas les moyens de l’acheter et encore moins le temps de l’insérer. Au bout de quelques semaines, elle se rend compte qu’elle est enceinte. Et en même temps, elle est horrifiée d’apprendre qu’elle est séropositive.
Elle a déjà trois enfants et vit dans une pauvreté abjecte. Que fait-elle? L’Evêque de Port-Louis, Mgr Maurice Piat, réclame «une vraie solidarité avec les femmes en détresse». Mais comment la déployer?
Et si, dans cette même maison, le père viole sa fille depuis qu’elle a 12 ans et que cette enfant attend un bébé? Que doit faire cette fille? Que devons-nous faire pour elle? Si dans cette même maison, le grand-père qui a déjà violé sa fille, viole aussi sa petite enfant et celle-ci, qui est à peine sortie de l’enfance, attend aussi un bébé? Que doit faire cette future maman?
Dans la maison d’à coté, l’oncle viole ses nièces régulièrement, dont une qui est handicapée. Cette dernière est enceinte et ne peut pas aller à l’école. Que faisons-nous? Vous croyez que j’exagère? Et bien non, c’est cela la réalité de nombreuses femmes de ce pays. Celles qui ne peuvent se faire avorter dans les cliniques ou se rendre à la Réunion pour le faire. Ce sont ces atrocités-là qui nous font peur et que nous refusons d’entendre. Le livre «La parole libératrice» (2006 et 2008), édité par Gender Links et la Media Watch Organisation-GEMSA, nous éclaire sur ces histoires vraies qui nous donnent la chair de poule et que nous refusons souvent de croire.
La solution ‘idéale’ pour ces femmes-là, c’est ‘l’abattoir’ de l’arrière-cour avec des charlatans utilisant des instruments de torture. La suite, nous la connaissons tous. Soyons humains et arrêtons de montrer des photos qui effraient. En Afrique du Sud, l’avortement est légal dans les cas suivants:
(1) Quand il s’agit de sauver une vie
(2) Quand la santé physique et mentale de la mère est en jeu
(3) Dans des cas de grossesse résultant d’un viol ou de l’acte d’inceste
(4) Pour des raisons économiques.
La loi exige que l’avortement soit pratiqué par un médecin et dans des conditions stériles au sein d’un hôpital public ou d’une clinique enregistrée auprès des autorités et avec la permission du chef de l’établissement hospitalier.
Dans certains cas, comme celui d’une grossesse résultant d’un viol, d’un acte d’inceste et d’une relation sexuelle avec une handicapée, il faut être en possession d’un certificat du magistrat de la région. Il y a bien sûr des procédures à suivre. Nous ne demandons pas de laisser pratiquer des avortements comme on balancerait une lettre qu’on a froissée dans une poubelle!!!
L’adoption est bien sûr une bonne chose et Monique Dinan fait un travail extraordinaire à la tête du Mouvement d’Aide à la Maternité (MAM). Mais je me demande si les handicapées ou les jeunes filles qui ont vécu dans leur chair le viol ou l’inceste iront dans ce centre. La stigmatisation que subit une femme violée par son mari et qui, par la suite, devient séropositive, est impossible à gérer. Cette femme-là n’ira pas chercher de l’aide. Elle se repliera sur elle et ne pourra plus continuer à travailler, ni à s’occuper de sa famille. C’est cela que nous voulons?
Ne pas prendre ses précautions quand on a les moyens de le faire et se faire avorter par la suite est impardonnable certes. Un fœtus de plus de quatre mois qui sort du ventre de sa maman est comme un enfant que l’on perd. Monique Dinan a raison quand elle parle des séquelles d’un avortement.
J’ai vécu la perte d’un bébé et je peux parler de ses séquelles en connaissance de cause. J’avais 20 ans. J’étais encore étudiante quand j’ai fait une perte après alors que j’étais enceinte d’un peu plus de quatre mois. Cela s’est passé dans le plus grand hôpital d’Edimbourg en Ecosse. J’ai eu beaucoup de chance car les spécialistes m’entouraient et se sont bien occupés de moi. Mais pour moi qui étais enceinte pour la première fois, c’était un drame. Je n’ai jamais pu faire mon deuil.
Je comprends donc combien un avortement est un choix difficile. James Burty David, ministre des Administrations régionales, a raison quand il dit «qu’aucune femme ne se fait avorter par plaisir. L’avortement est toujours l’expression d’un échec. Cet acte est aussi accompagné d’une grande souffrance. Il faut absolument se pencher sur la détresse de ces femmes qui n’ont pas les moyens de mettre en terme à une grossesse non-désirée dans une clinique à l’étranger et qui livrent leur utérus à des charlatans armés d’instruments de torture moyenâgeux».
Les femmes en détresse, il n’en manque pas à Maurice. Soyons humains! Ne nous traitez pas de barbare ou de criminel. Un débat national, avec des résultats concrets, est «long overdue». Notre voisin, l’Afrique du Sud, peut nous servir d’exemple.
Loga Virahsawmy
Loga Virahsawmy est la directrice de Gender Links Maurice. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links qui apporte des perspectives nouvelles à l’actualité quotidienne.
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