Sexualité : La contraception est l’affaire de tous


Date: January 1, 1970
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Un sujet qui revient régulièrement dans l’actualité et qui est toujours présent dans le quotidien des gens: la contraception.  La contraception a été, en mars dernier, dans l’actualité à travers le monde et surtout dans les pays africains suite aux déclarations du Pape Benoît XVI sur le sujet alors qu’il se rendait à Yaoundé au Cameroun. A Maurice le sujet a aussi été au centre des discussions.
 
La contraception en tant que tel n’est pas un sujet tabou à Maurice et les méthodes disponibles ne manquent pas. La Mauritius Family Planning & Welfare Association (MFPWA) qui a été fondée en 1958, est extrêmement active dans la vente de préservatifs masculins et féminins, de spermicides, de diaphragmes, ou de contraceptifs hormonaux, le tout à des prix accessibles.
 
Vidya Charan, la directrice de cet organisme explique les raisons de la création de la MFPWA. «Notre objectif initial visait à réduire le taux de fécondité qui a été ramené de 5.86 en 1962 à 1.94 en 1986.  Depuis que nous existons, nous avons offert une gamme de méthodes de contraception au public».  
 
Au fil des années, l’utilisation du préservatif masculin a pris de l’ampleur de manière constante. «Chaque année, nous avons remarqué une augmentation de 15% à 20% dans la vente de nos préservatifs», affirme Sadeck Vawda, directeur de Unicorn Trading, compagnie qui importe les préservatifs de la marque «Durex». Il souligne aussi que la décision de placer des préservatifs dans les grandes surfaces a été prise il y a trois ans afin de répondre à la demande. «Et aujourd’hui, la vente des préservatifs dans les supermarchés est égale à celle des pharmacies», explique ce grossiste en produits pharmaceutiques.
 
Certaines données indiquent aussi qu’en sus des préservatifs, les Mauriciens sont de plus en plus nombreux à utiliser les différents modes de contraception existants. Avec pour résultat un taux de natalité qui a baissé de manière progressive et continue depuis l’an 2000. Cette année-là, 20 205 naissances étaient enregistrées. En 2008, on en dénombrait seulement 16 334, ce qui représente une baisse, sur huit ans, de près de 20%.
 
Ces statistiques pourraient indiquer une croissance au niveau de l’utilisation des moyens de contraception. Cette interprétation est notamment confirmée par la directrice de la MFPWA. «Effectivement, l’utilisation des méthodes contraceptives a eu un immense impact sur la réduction du nombre de naissances à Maurice et cela depuis les années 50», souligne-t-elle.  «Mais il y a d’autres facteurs qui contribuent aussi à cette baisse du taux de natalité, comme par exemple, l’âge du mariage qui a reculé, les personnes qui sont de nos jours plus éduquées, en particulier les femmes, les problèmes d’infertilité parmi les jeunes couples ou encore les couples qui ne veulent pas avoir un enfant par choix».
 
Pour avoir une idée précise du taux d’utilisation des contraceptifs, il faut remonter le temps de plusieurs années. Les statistiques officielles les plus récentes émanant du ministère de la Santé sur la prévalence de la contraception remontent à 2002. Cette étude, le «Contraceptive Prevalence Survey», est menée tous les 10 ans. Le ministère a constaté en 2002 que près de huit femmes sur 10 utilisaient la contraception. «En 2002, la méthode la plus utilisée était le coït interrompu comparativement à l’année 1991, où la méthode la plus prisée était alors la pilule contraceptive», explique Vidya Charan.
 
Pour Mélanie, 24 ans, la pilule est devenue le moyen de contraception le plus pratique. «Cela fait deux ans que je sors avec mon petit ami et au début, nous utilisions des préservatifs». La jeune femme, qui travaille dans une agence de publicité, explique être passée à la pilule contraceptive. «Il nous arrivait parfois de ne pas mettre le préservatif et il y a quelques mois, j’ai cru être enceinte. Mais heureusement que c’était une fausse alerte».
 
La jeune femme dit être au courant du risque qu’elle court en n’utilisant pas le préservatif durant les relations sexuelles,  à savoir celui de contracter des infections sexuellement transmissibles dont le VIH/SIDA. «Entre mon petit ami et moi, c’est une question de confiance. Et pour l’instant, le plus important pour moi est de ne pas tomber enceinte».
 
Si les femmes hésitent toujours à se présenter en pharmacie ou à se rendre au supermarché pour acheter des contraceptifs, elles fréquentent bel et bien les bureaux de la MFPWA.  «La majorité de nos clients a toujours été des femmes mais avec les services spécialisés que nous offrons pour les hommes, 25% de notre clientèle est masculine. Il n’y a pas que les hommes adultes qui viennent chez nous, il y a aussi des jeunes», explique la directrice de cette association.
 
Les jeunes et les célibataires représentent justement une catégorie qui n’est pas considérée dans les études menées par l’Etat. Le «Contraceptive Prevalence Survey» en est une illustration. L’étude n’a été effectuée qu’auprès des femmes mariées, âgées entre 15 et 44 ans. La sexualité des adolescents et des célibataires a donc été occultée.
 
Cela s’explique par le fait que l’âge légal pour les relations sexuelles est de 18 ans. De plus, la société mauricienne qui s’accroche aux signes externes de la ferveur religieuse et qui reste moralisatrice, ignore délibérément le phénomène de sexualité chez les jeunes et les célibataires.
 
Or, le fait d’ignorer cette réalité et cette catégorie de personnes peut contribuer à augmenter le nombre de rapports sexuels non-protégés et à accroître les risques de contraction de maladies sexuellement transmissibles chez les adolescents. «Selon les témoignages que nous recevons durant les différentes causeries sur la santé sexuelle et reproductive que nous animons régulièrement dans les écoles primaires et secondaires et aussi auprès des jeunes, nous découvrons à quel point un grand nombre de jeunes sont sexuellement actifs.  Nous ne devons plus nous voiler la face», insiste Vidya Charan. 
 
Aujourd’hui plus que jamais, l’éducation sexuelle doit être de rigueur à l’école, ainsi qu’une proximité avec les jeunes pour savoir comment ils vivent. Il faut donc commencer par reconnaître qu’ils sont sexuellement actifs et leur donner les moyens de se protéger, aussi bien sur le plan physique que psychologique.
 
 
Sharon Sooknah est journaliste à Maurice. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links qui apporte des perspectives nouvelles à l’actualité quotidienne.


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