La Mauricienne Priscilla Chery-Lebon: «S’assumer Á  travers le sport »


Date: April 26, 2011
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Quand on tombe, il faut toujours se relever. Cet enseignement tiré du judo a toujours inspiré Priscilla Chery-Lebon, 39 ans, qui est bardée de médailles. Elle a été championne de Maurice de 1986 Á  1998, quadruple médaillée d’or aux Jeux des îles de l’océan Indien en 1993, 1998 et 2003, championne d’Afrique en Tunisie en 1994 et médaillée d’or aux Jeux Africains d’Harare en 1995.

Et 27 ans après ses premiers pas sur un tatami, elle est une Senior Sport Coach épanouie au sein du ministère de la Jeunesse et des Sports et incarne les valeurs apprises du sport: la discipline, le respect des règles et d’autrui, le sens des responsabilités et le partage du savoir. La vie l’a faite femme alors que le sport lui a apporté la plus-value d’une énergie positive. Voici son parcours.

Priscilla Chery-Lebon a 12 ans quand elle pénètre dans la salle où s’entraînent les judokas de l’Organisation Fraternelle de Cassis. On est en 1984. Elle allait y rencontrer sa cousine Monique Paul et finalement, écoutant sa nature sportive – elle jouait déjÁ  au football avec les jeunes de son quartier Á  Cassis, situé Á  la périphérie de la capitale Port-Louis et était férue d’athlétisme au collège London – elle décide d’enfiler un kimono et d’apprendre le judo sous la férule de Georges Othello et Sylvio Joseph.

Deux ans plus tard, elle décroche son premier titre de championne nationale au collège Royal de Port-Louis chez les 55 kg. Elle s’impose face Á  la favorite, Marie-Claire Fricot. Un petit exploit que salue son adversaire et qui lui fait prendre conscience qu’elle a le potentiel d’aller plus loin. «Ce premier titre a influé sur la suite de ma carrière. J’ai compris qu’il y a un début Á  tout », déclare-t-elle.

Le titre qui lui a fait le plus plaisir est celui de championne d’Afrique en 1994. «Je me suis retrouvée face Á  la Gabonaise Mélanie En-Goan en finale. Elle était la favorite et avait plus d’expérience. Elle s’entraînait Á  l’Institut National du Sport et de l’Education Physique (INSEP) en France. Je n’avais pas l’expérience d’un championnat d’Afrique. Après le combat, elle m’a pourtant dit: Tu m’as étonnée! »

Quelques mois plus tard, elles sont les deux seules Africaines en stage de préparation Á  l’INSEP, deux judokates venues de loin qui sont appelées affectueusement «les Noires ». Après ce passage Á  l’INSEP, Priscilla Chery-Lebon gravit les échelons rapidement. Elle sera championne de Maurice de 1986 Á  1998 (-55 kg). En 2001, après un arrêt de deux ans, elle reprend le judo Á  la demande de Michael Glover, responsable du comité d’organisation des 6e Jeux des îles de l’océan Indien prévus Á  Maurice en 2003. Et cela alors qu’elle vient de donner naissance Á  une fille, Amélie et Á  un fils, Nicolas. Elle relève un premier défi: perdre 15 kg en trois mois afin d’être en mesure de combattre chez les -70 kg. Cela lui réussit. Elle a en effet rendez-vous avec l’or en individuel et dans la compétition par équipe.

Une nouvelle satisfaction personnelle obtenue Á  l’école du courage où elle avait bataillé ferme pour devenir championne d’Afrique en 1994 en Tunisie (-61 kg) et médaillée d’or aux Jeux africains d’Harare en 1995 (-66 kg), deux titres qui la propulsent Á  deux reprises et coup sur coup ‘Sportive de l’année’ du Mauritius Sports Council. A Harare, elle obtient sa qualification pour les Jeux olympiques d’Atlanta, « une belle expérience » malgré une élimination d’entrée.

Senior Sport Coach au ministère de la Jeunesse et des Sports depuis 2005, elle est responsable du développement et de la promotion du judo chez les jeunes âgés de 12 ans Á  monter, du volet judo éducatif dans la région de Curepipe et de la formation des entraîneurs de niveaux 1 et 2. Des tâches qui ne lui font pas peur car Priscilla Chery-Lebon s’était familiarisée au coaching au début des années 90 et animait alors l’école municipale de judo de Port-Louis.

«Combattre Á  haut niveau aide énormément l’entraîneur. Ce qu’on apprend en tant qu’athlète – la physiologie, l’anatomie etc. – nous aide par la suite. On comprend mieux l’athlète et le courant passe mieux », assure-t-elle. C’est encore plus vrai pour cette passionnée car le sport lui a donné « une vision de la vie autre » où se côtoient le besoin de positiver, la persévérance et la force de caractère.

Priscilla Chery-Lebon incarne en cela l’idéal prôné par le Comité international olympique (CIO) qui a fait de la participation des femmes aux activités sportives et aux Jeux olympiques, de même que de leur engagement dans les instances administratives et sportives, une de ses préoccupations majeures.

Le CIO estime en effet que la possibilité de pratiquer un sport est un droit que l’on acquiert Á  la naissance. Il considère également le sport comme un moyen de communication et d’émancipation important, qui peut contribuer au développement du bien-être physique.

Par le biais du sport, les femmes et les jeunes filles peuvent prendre conscience de leur rôle dans la société. « Le rôle du CIO est d’encourager et soutenir la promotion des femmes dans le sport, Á  tous les niveaux et dans toutes les structures dans le but de mettre en Å“uvre le principe d’égalité entre hommes et femmes. » C’est écrit noir sur blanc dans la Charte Olympique de 2007. Et Priscilla Chéry-Lebon y croit fermement et tente de l’inculquer aux jeunes filles qu’elle coache.

En 2010, Priscilla Chery-Lebon a reçu le Prix de l’Association des Comités Nationaux Olympiques Africains pour sa contribution en tant que femme dans le domaine du sport. Complexée quand elle était petite, elle a pu, grâce au judo, vaincre sa timidité, se bâtir une personnalité et surtout s’assumer en tant que femme. « Quand je suis stressée le matin, une heure de marche et de footing et je me sens bien. J’encourage les femmes Á  faire du sport, que ce soit de loisir ou de compétition. Les jeunes filles et les femmes peuvent s’assumer Á  travers le sport. Nous vivons Á  100 Á  l’heure. Il ne faut pas se laisser aller. Le corps de la femme change avec l’âge. Elle doit s’assumer Á  chaque étape. Quelque soit l’âge, on reste femme. Le sport nous y aide, » affirme-t-elle.

C’est le message qu’elle adresse Á  toutes celles qu’elle rencontre en salle de sport ou Á  l’extérieur. Elle estime que c’est sa contribution Á  l’édification d’une société meilleure.

Robert D’Argent est journaliste Á  Maurice. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.

 

 


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