La meute sauvage est perplexe


Date: May 4, 2015
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Maurice: Nous vivons dans un pays où chaque matin, les médias nous accueillent avec d’horribles histoires de filles et de femmes torturées, violées, tuées ou traitées comme des paillassons et des animaux.

Alors que sa famille et leurs amis s’amusaient, le 5 avril dernier pour la Pâques, Eleana Gentille était portée disparue. La police s’est immédiatement mise Á  sa recherche. Son cadavre a été retrouvé dix jours plus tard dans un état de décomposition avancée. Elle avait été violée et tuée.

En 2010, Samuelle Martin, sept ans, a été violée et brÁ»lée vive par son oncle. En 2006, le cadavre de la petite Anita Jolita, deux ans, était retrouvé en mer après qu’elle ait été violée, sodomisée et assassinée. La même année, Jennia Arekion, quatre ans, mourait Á  l’hôpital après avoir été agressée sexuellement dans sa propre maison.

La liste est trop longue pour un petit pays comme Maurice.

Mais lorsque nous avons entendu Á  la radio la perplexité de la meute sauvage, nous n’en croyions pas nos oreilles. Le peuple officiellement étiqueté d’ «admirable » et méprisé officieusement pour obtenir son vote, la pseudo-démocratie ne pouvant accepter d’appeler un chat par son nom, a une grande propension Á  vomir ses vilains réflexes d’attardé derrière le bouclier de l’anonymat.

L’un d’eux a trouvé que la punition convenable pour de tels crimes était la peine capitale. Un autre a décrété qu’il était inacceptable de conserver en garde Á  vue une personne coupable d’un crime odieux et que subvenir Á  ses besoins était un gaspillage des fonds publics. La solution acceptable était la pendaison. Un autre a estimé que la pendaison était insuffisante et trop douce. Ce justicier Á  l’inspiration divine a suggéré que les prisonniers soient flagellés et torturés et que lorsqu’ils seraient trop faibles pour endurer le châtiment, il faudrait les soigner et les aider Á  aller mieux afin qu’ils puissent subir davantage de flagellation et de torture.

Oui, ces adorateurs du Dieu d’amour militent pour mettre un terme Á  la violence. En tant que Mauriciens typiques, ils connaissent tout sans vouloir apprendre quoi que ce soit et n’osez surtout pas les contredire. Si vous le faites, ils vous feront goÁ»ter leur médicament non-violent. Après tout, ils sont Á  l’image de leurs leaders. Un autre qui s’est posé en grand penseur maniant une solution passe-partout a pontifié en disant que tout ce qu’il y avait Á  faire était de changer la mentalité des gens. Comment? Avec une baguette magique? Par le biais d’une chirurgie au cerveau?

Le contexte de toutes ces élucubrations rares est la violence sexuelle en général et la violence sexuelle sur les enfants en particulier. Les Mauriciens étant ce qu’ils sont, c’est-Á -dire ignorants des preuves par nature et culture, ils n’ont pas éprouvé le besoin de trouver des causes Á  un problème car ils sont pleinement satisfaits que les effets sont faciles Á  comprendre et que ce qu’ils croient avoir compris est sans aucun doute la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

Nous osons dire certaines choses qui seront sÁ»rement jetées Á  la poubelle par ces experts auto-proclamés.

– Les auteurs de ces crimes odieux pourraient souffrir d’une forme de maladie mentale qui a un impact sur leurs pensées, leurs sentiments ou leur humeur.
– Ces auteurs peuvent avoir eux-mêmes été victimes de violence sexuelle lorsqu’ils étaient jeunes et/ou avoir été témoins du viol de leurs mères et/ou sÅ“urs et de ce fait, considèrent qu’un tel comportement est normal
– Ces auteurs peuvent venir de familles disloquées et peuvent avoir grandi dans la rue et que ce que nous considérons comme la décence normale n’a pas de place dans leur constitution
– Les auteurs de ces atrocités peuvent croire dur comme fer en les vertus phallocrates du patriarcat qui entrevoient les organes génitaux féminins comme un trou dépravé et les organes génitaux masculins comme une arme/un outil ou un harpon
– Ces auteurs peuvent entrevoir l’agression sexuelle comme une arme de guerre ou un instrument de vengeance

S’il est correct de les considérer comme des gens ayant des problèmes mentaux, sociaux et culturels sérieux, devrions-nous les tuer ou plutôt les traiter médicalement et Á  travers des programmes de réhabilitation, même s’ils passent le reste de leurs jours en prison ?

Il y a une autre solution que la plupart d’entre nous préférons esquiver. De nombreuses jeunes filles et femmes sont enceintes après un viol ou un rapport sexuel ponctuel et consenti. Le brave géniteur disparaît habituellement au lieu d’assumer ses responsabilités. Les femmes ne veulent pas de cet enfant mais sont obligées par la loi de donner naissance Á  un enfant dont personne ne veut. Ce sont ces enfants abandonnés qui sillonnent les rues et qui sont des proies faciles pour les prédateurs. Parce que dans une société patriarcale, les femmes sont perçues comme des potiches sexuelles et des machines Á  faire des enfants, elles n’ont pas le droit de choisir si elles veulent d’un bébé ou pas. Leurs corps sont considérés la propriété personnelle des mâles.

La législation doit accorder la liberté aux femmes de choisir. Et la grossesse et la réclusion ne devraient pas être considérées comme une punition Á  être infligée Á  des femmes perçues comme dissolues. En guise de résultat Á  cette attitude, même une fille qui a été violée est perçue comme responsable. «Elle l’a cherché », disent-ils. Il ne faut pas hésiter Á  dire les choses: NOUS DEVONS LEGALISER L’AVORTEMENT. Laissons ces personnes moralement honnêtes hurler autant qu’elles veulent. Il y a trop de critères différents dans ce pays. Ne sont-elles pas moralement honnêtes ces personnes ayant les moyens qui condamnent la légalisation de l’avortement en public mais qui envoient leurs chères petites Á  la Réunion pour qu’elles aient droit Á  un avortement rapide et médicalisé ?
Cette situation a assez duré !

Loga Virahsawmy est l’ancienne directrice du bureau francophone de Gender Links et membre du conseil d’administration de cette organisation non gouvernementale de l’Afrique australe. Dev Virahsawmy, son mari, est écrivain engagé, poète et militant de la langue créole. Cet article fait partie du service d’information de Gender Links qui apporte des perspectives nouvelles Á  l’actualité quotidienne.

 


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