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C’est un fait que lorsque l’on est femme, on fait de facto face Á des inégalités. Et si l’on est handicapée de surcroît, c’est pire. L’Africaine handicapée panse toujours ses blessures, infligées soit par le regard de la société, soit par les discriminations et d’autres violences sexuelles. Certains criminels et le mot n’est pas trop fort pour ceux-lÁ , voient en ces femmes handicapées une proie sexuelle facile.
La femme handicapée est sans défense de par son handicap et dans la plupart des cas, la résultante de cet handicap fait qu’elle ait très peu de moyens pour pouvoir obtenir une assistance médicale Á l’issue de son agression, ni même légale pour défendre ses droits.
A Maurice, la justice prend des positions étonnantes par rapport aux pervers sexuels qui voient en les femmes handicapés une proie de choix. En octobre 2012, un auteur présumé de viol sur une handicapée a bénéficié d’un non-lieu, sous prétexte que la
victime était inconsistante dans son témoignage. Comment aurait-il pu en être autrement quand on sait que la jeune femme souffre d’une déficience mentale?
Un mois plus tard, un autre magistrat s’est montré plus sévère Á l’égard de trois jeunes mineurs arrêtés pour le viol d’une femme handicapée. Selon la police mauricienne, un seul aurait commis le viol alors que les deux autres auraient immobilisé leur victime et se seraient contentés du rôle de spectateur. La jeune fille, une habitante de Vacoas, ville située sur le plateau central de l’île, connaissait au moins un de ses agresseurs.
Dans un premier temps, ces hommes ont essayé de lui proposer d’avoir des relations sexuelles avec eux. Chose qu’elle a catégoriquement refusée. C’est alors qu’ils l’auraient entraînée de force dans une cave située Á proximité de la maison de la jeune fille, avant d’être rejoint par leur troisième camarade et abuser d’elle. Des cas similaires se produisent Á Maurice et en Afrique sans que les fautifs soient punis pour autant, faute de dénonciation. Quand il n’y a pas dénonciation, les gens ont tendance Á penser que l’acte était consentant.
Les autorités malgaches se penchent aussi sur cette question car 80 % des femmes handicapées sont des mères célibataires confrontées aux difficultés de la vie. C’est ce qui ressort des diverses manifestations organisées en décembre 2012 Á Antananarivo, la capitale malgache, pour marquer la Journée de Solidarité envers les Personnes Handicapées. Ces manifestations ont cherché Á faire mieux comprendre les problèmes liés au handicap et Á mobiliser le public et les responsables en faveur de la préservation de la dignité, des droits et du bien-être des handicapés.
La problématique du handicap est réelle Á Madagascar car elle touche un nombre significatif d’enfants et de familles démunies. La prévalence globale du handicap dans la Grande Ile est estimée Á 7,5%, soit 1,5 million de personnes.
L’État malgache dispose d’un cadre juridique reconnaissant le droit Á l’éducation de l’enfant handicapé en milieu ordinaire ou spécialisé. Mais malgré cela, la prise en charge des personnes handicapées, notamment en matière d’éducation, reste critique.
En Afrique du Sud, leur situation est plus grave. Ce pays détient le record pour le continent du nombre de viols sur les femmes handicapées, soit une femme violée toutes les 26 secondes. Ces deux dernières années, les viols ont augmenté en intensité. Une jeune Sud-africaine de 17 ans, souffrant d’un handicap mental, a été victime d’un viol collectif et ses agresseurs, plusieurs hommes et adolescents, non content de l’agresser, ont filmé leur acte et ont mis le film en ligne. Ces images insupportables se sont propagées comme une traînée de poudre, provoquant la stupeur et l’indignation dans le pays.
Autre viol qui a marqué les esprits a été celui d’une jeune Sud-Africaine, qui a été payée par ses violeurs après l’agression. Ces bourreaux lui ont jeté l’équivalent de 25 cents en échange de son silence et l’ont ensuite abandonnée, emportant sur leurs portables le film de cette atrocité. Film qui a rapidement circulé Á Soweto, banlieue de Johannesburg, avant de gagner d’autres quartiers de cette ville.
Les stéréotypes et les mythes abondent Á propos de la sexualité des femmes handicapées. Elles sont souvent perçues comme faibles, indésirables, ou encore asexuées, ce qui les rend encore plus vulnérables aux violences sexuelles. Pour justifier leur barbarie, certains violeurs estiment qu’ils font une faveur Á ces femmes car sans eux, elles ne pourraient pas avoir de relations sexuelles. Pire, certains prédateurs ne les considèrent même pas comme des êtres humains.
Cette situation inquiète beaucoup les gouvernements africains, surtout ceux qui ont ratifié le Protocole de la SADC sur le Genre et le Développement, de même que le Protocole de l’Union Africaine sur les Droits des Femmes, qui soutiennent les droits des femmes âgées et handicapées.
S’il y a bien un domaine dans lequel les pays de la SADC doivent renforcer leur arsenal légal, c’est envers les femmes et en particulier envers celles qui sont handicapées!
Leevy Frivet est journaliste Á Maurice. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.
Comment on Les Africaines handicapées toujours vulnérables