Maltraitance alléguée: 15 femmes malgaches sont mortes au Liban


Date: December 26, 2010
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Le calvaire des femmes malgaches continue au Liban. Selon les dernières statistiques révélées par le ministère de la Population malgache, entre l’année dernière et décembre 2010, 15 femmes malgaches ont trouvé la mort au Liban.

La dépouille de Batatsara est arrivée il y a une semaine Á  l’aéroport international d’Ivato et a été recueillie par une famille anéantie qui cherche des réponses. Après avoir quitté le pays le 15 décembre 2008, cette jeune femme n’a obtenu un contrat de travail de ses employeurs que le 25 février 2009.

Selon ce contrat, son salaire mensuel était de 300 000 Ariary, soit 150 dollars. Sa mère a déclaré qu’elle n’a été en mesure d’envoyer une partie de son salaire accumulé, soit 600 000 Ariary (300 dollars) que le 13 aout 2010 via Western Union. C’est le seul transfert d’argent qu’elle n’ait jamais pu faire.

Comme cette famille, beaucoup d’autres Malgaches Á  travers l’association des parents des femmes victimes d’injustices au Liban, crient au scandale. Le Syndicat des Professionnels Diplômés en Travail Social (SPDTS) dénonce une forme de traite de femmes qui ne date pas d’hier.

«Des cas de mauvais traitements ne cessent d’être rapportés », souligne Jeannoda Norotiana Randimbiarison, présidente du SPDTS, syndicat qui a été parmi les premiers Á  prendre en charge psychologiquement les femmes victimes de maltraitance au Liban et Á  appuyer les familles dans leurs démarches de recherche et de rapatriement de leurs filles. Selon elle, beaucoup de femmes subissent une expérience désastreuse au Liban.

Julie Anna qui a séjourné aussi au Liban, affirme que la vie y est dure pour les Malgaches. Cette femme est partie le 3 aoÁ»t 2008 sous contrat d’une durée de trois ans. Elle est revenue en juin dernier avec dans la bouche un souvenir amer car sa vie n’a été que torture lÁ -bas.

De leur côté, les agences de placement se défendent d’être responsables de quoi que ce soit. Elles soutiennent qu’elles agissent de bonne foi. «Les actes de torture ne touchent qu’une minorité de travailleurs », estime Julio Harilala, le président du Syndicat des Bureaux de Placement privés de Madagascar (SBPM).

Mais après le rapatriement du 15e cadavre d’une Malgache, les choses semblent bouger un peu en faveur de l’association des parents des femmes victimes d’injustice au Liban. Benja Urbain Andriatsizehena, vice-président du Conseil de la Transition, a annoncé l’ouverture d’une enquête parlementaire pour éclaircir cette affaire.

Jusqu’Á  hier, 364 demandes de rapatriement de Malgaches encore au Liban ont été reçues par le ministère de la Population qui se sent impuissant Á  satisfaire les demandes de toutes ces familles. Un rapport publié par le SPDTS fait état de près de 7000 Malgaches au Liban et seules 6000 d’entre elles possèdent un contrat cautionné par l’administration malgache. Des chiffres émanant du ministère indiquent que 526 femmes malgaches sont déjÁ  retournées Á  Madagascar.

«Il est très difficile de rattraper 20 ans sans démarches pour secourir les filles malgaches au Liban. Le rapatriement n’est envisageable qu’Á  partir de l’année prochaine lorsque les gouvernements des deux pays parviendront Á  un accord, » souligne Nadine Ramaroson, ministre de la Population.

La ministre rappelle que le phénomène de maltraitance des Malgaches au Liban remonte au début des années 1990. Mais il s’est accentué après 2007, quand les capitales de deux pays, Beyrouth et Tana, ont passé des accords en vue de faciliter par les familles libanaises l’embauche de travailleuses malgaches. Cet accord concerne l’octroi de visa gratuit, la mise en place d’un nouveau contrat et les facilitations accordées aux agences de recrutement.

Le rapatriement nécessite beaucoup d’argent car une personne a besoin de 1000 dollars pour rentrer au pays. Les jeunes malgaches partent de Madagascar pour travailler en tant que femmes de ménage. Ces dernières leur versent un salaire avoisinant les 150 dollars, une offre généreuse et alléchante pour un pays pauvre comme Madagascar où plus de la moitié de la population vit en-dessous du seuil de pauvreté.

Madagascar est parmi les pays qui luttent contre la traite et la torture des personnes. Une initiative cadrant dans le protocole de la SADC sur le Genre et le Développent que le pays a signé. L’envoi des femmes malgaches au Liban doit être bien étudié et les responsabilités doivent être assumées non seulement par les familles qui acceptent que leur fille, mère, tante ou sÅ“ur partent au Liban travailler malgré tous les risques que cela comporte pour leur vie mais aussi décideurs politiques Á  Madagascar qui laissent faire.

Fanja Razafimahatratra est journaliste free-lance Á  Madagascar. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.

 


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