Mobu la Congolaise: le cumul des emplois pour survivre


Date: October 24, 2010
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Mobu, la quarantaine, qui a requis l’anonymat, est mariée et mère de cinq enfants, deux garçons et trois filles. Elle a étudié le journalisme dans une université située dans la commune de la Gombe Á  Kinshasa, capitale de la RDC.

Son diplôme obtenu, elle rêvait de faire carrière dans l’audiovisuel. Mais elle n’a pu pratiquer ce métier car tous les responsables qu’elle approchait lui faisaient la cour. «J’ai compris que leurs critères de sélection n’étaient pas la méritocratie. Et comme j’ai des principes et que je suis une femme mariée et heureuse en ménage, je n’ai pu accepter ces propositions indécentes. J’ai préféré changer de secteur », dit-elle avec colère rien qu’Á  l’idée d’y penser.

Le harcèlement sexuel est pourtant réprimé dans le Protocole de la Communauté pour le Développement de l’Afrique australe sur le Genre et le Développement qui prévoit une variété de dispositions incluant notamment l’application de législations visant Á  éliminer toutes les formes de violences basées sur le genre. La RDC est signataire de ce Protocole mais dans la réalité, ses dispositions ne sont pas appliquées.

Attachée Á  un cabinet ministériel il y a dix ans, elle agissait en tant que «secrétaire ». Ensuite, il y a deux ans, elle était responsable du secrétariat général dans une entreprise privée de gardiennage installée Á  Kinshasa et avait sous sa responsabilité près de 200 hommes qu’elle gérait «en dépit de leurs caprices et sautes d’humeur. »

La partie n’a pas toujours été facile pour elle. Mais grâce Á  ses compétences, sa bonne gestion et sa détermination, elle a réussi Á  faire l’entreprise devenir profitable alors qu’Á  son arrivée, il n’y avait pratiquement pas d’argent dans les caisses. Son succès lui a valu des inimitiés car ses collaborateurs masculins se sont mis Á  la jalouser.

C’est ainsi qu’elle a commencé Á  avoir des ennuis avec son patron. «Il a fini par me renvoyer sans me verser mon dernier mois de salaire, ni d’indemnités de licenciement. C’était le début de mon calvaire. Je m’ennuyais Á  la maison et ne savais plus Á  quel saint me vouer. Depuis que j’ai quitté cette entreprise, j’ai appris que sa gestion financière pose Á  nouveau problème. »

Son ex-patron lui aurait téléphoné pour lui faire part de son regret et lui présenter des excuses en lui demandant de reprendre du service. Elle a refusé d’en entendre parler. Elle n’est pas disposée Á  retourner chez son ancien employeur où elle déclare avoir failli mourir. Elle ne veut en dire plus sur le sujet. Mais Á  ses yeux, il s’agit d’une entreprise où les droits des travailleurs sont bafoués.

Deux mois après sa suspension, Mobu a eu la joie de trouver un autre emploi dans un cabinet ministériel où elle travaille comme hôtesse d’accueil. «Je participe également Á  un projet qui me permet de joindre les deux bouts en fin de mois », confie-t-elle.

Mobu gère son agenda journalier avec soin. Elle s’organise pour remplir convenablement ses tâches. «J’ai appris Á  arriver Á  mon premier job Á  6h45 pour m’éclipser vers 10 heures, heure Á  laquelle je me rends Á  mon deuxième boulot où je m’arrange deux fois par semaine pour obtenir un ordre de mission qui me permette de faire mes recherches hors du bureau », explique-t-elle.

C’est ainsi qu’elle arrive Á  travailler Á  plein temps Á  son poste où elle reçoit les visiteurs de son chef. «C’est le seul moyen pour moi d’arriver Á  payer la scolarité de mes enfants et de subvenir Á  leurs besoins vitaux ». Heureusement qu’elle travaille car son mari n’a pas reçu de salaire pendant plusieurs mois. Une situation probablement liée Á  la mauvaise gestion des responsables de l’entreprise où il travaille.

Elle avoue vouloir continuer ses études dans une filière de développement en vue de renforcer ses capacités dans son nouvel emploi mais elle ignore où elle trouvera le temps pour le faire.

Sylvestre SaÁ¯di Nyota est journaliste en République Démocratique du Congo. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.

 


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