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La lutte a été longue. Elle a duré dix ans. Nous les activistes de Gender Links avons sillonné le pays, allant dans pratiquement tous les villages de Maurice et utilisant le Protocole de la SADC sur le Genre et le Développement pour parler aux hommes et aux femmes de l’importance d’avoir des femmes en politique.
Nous avons organisé des ateliers de travail et lors de l’un d’eux qui s’est tenu juste avant les élections générales de 2005, le Premier ministre, Navin Ramgoolam, a fait une présentation donnant Á réfléchir sur la raison pour laquelle il est crucial d’avoir des femmes en politique. Il a même affirmé Á ses centaines de partisans présents dans l’audience que son parti est conscient de ce déficit (les femmes n’étaient représentées qu’Á 5.4% au Parlement) et a ajouté que «le scrutin uninominal constitue une entrave pour les femmes alors que la représentation proportionnelle ou le système mixte peut leur être favorable. » Il a dit espérer qu’une fois au pouvoir, son parti obtiendrait le consensus pour introduire le système de représentation proportionnelle.
Nous avons formé des activistes femmes au sein du Parti Travailliste (PTr) et du Mouvement Socialiste Militant (MSM) et après cette formation de quatre jours, ces 40 femmes ont dit espérer que leur parti leur donnerait des tickets pour qu’elles se présentent aux élections des collectivités locales. «Si nous pouvons faire campagne et faire élire des hommes, nous sommes sÁ»res de pouvoir nous faire élire, » ont-elles déclaré.
Le 28 mai 2011, nous avons organisé un débat sur la question de quotas pour les femmes au sein des élections des collectivités locales avec la participation de parlementaires du PTr, du MSM et du Parti Mauricien Social Démocrate, en présence de la ministre de l’Egalité du Genre, Sheila Bappoo. Elle a d’ailleurs abordé la question de la réforme des élections des collectivités locales afin de faire plus de place pour les femmes au sein de ce scrutin mais elle n’a pu prendre un engagement officiel Á cet effet.
Je me souviens avoir rencontré le ministre des Administrations régionales, Hervé Aimé, juste après sa nomination comme ministre. Je l’ai informé de tout le travail abattu Á Maurice depuis 2007 par Gender Links et la Media Watch Organisation pour aider les collectivités locales Á développer des plans d’actions sensibles au genre. Il s’est montré encore plus intéressé lorsqu’il a appris que GL allait aider les collectivités locales Á appliquer ces plans et Á développer des campagnes stratégiques. Nous avons profité de l’occasion pour évoquer notre souci Á l’effet que bien que Maurice soit considéré comme un modèle de démocratie, le pays n’affiche que 6.4% de femmes uniquement au sein des collectivités locales. C’était en juin 2010. Il a écouté mais ne s’est pas prononcé sur la question.
Lors de la Journée Internationale de la Femme, le 8 mars 2011, devant des centaines de femmes au centre de conférences de Grand-Baie, le Premier ministre a dit qu’il pense qu’il lui faudra finalement recourir au système de quotas pour qu’il y ait plus de femmes en politique.
Hervé Aimé peut être fier d’avoir écrit l’histoire comme étant le premier ministre Á avoir rendu légal le quota d’au moins 33% de femmes sur la liste des partis pour les élections des collectivités locales.
Ce n’est pas tous les jours que nous voyons des politiciens faire ce qu’ils disent et le ministre des Administrations régionales, ainsi que le Premier ministre doivent être félicités pour cette décision courageuse de rendre légal le quota de 33% de femmes au sein des élections des collectivités locales.
Désormais, c’est Á nous les activistes du genre de nous assurer que 33% de femmes se présentent Á ces élections. Les politiciens ont fait leur part, c’est Á nous de faire la nôtre et d’encourager les femmes Á entrer en politique.
Nous espérons qu’il ne s’agit lÁ que du début d’un nouveau chapitre du livre des femmes en politique Á Maurice et qu’il y aura d’autres réformes des lois électorales pour qu’il y ait un plus grand nombre de femmes Á se présenter comme candidates lors des élections générales de 2015.
Une ombre demeure au tableau: il est triste que Maurice n’ait pas encore signé le Protocole de la SADC sur le Genre et le Développement alors que dans la pratique, le pays est en train d’appliquer pratiquement toutes les 28 dispositions figurant dans ce protocole.
Loga Virahsawmy est directrice du bureau francophone de Gender Links Á Maurice et présidente de la Media Watch Organisation. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.
Comment on Obligation légale pour les partis politiques mauriciens d’aligner plus de femmes