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Des femmes Á Madagascar qui font un travail typiquement réservé aux hommes, il y en a beaucoup. Mais Célestine Randriambololona a su se démarquer des autres de par son choix de métier. Plus connue sous le pseudonyme de Rasoa, elle a choisi d’être chauffeur de taxi et se trouve être l’unique femme chauffeur de taxi de Tananarive, la capitale malgache. Sa base d’opération est dans le quartier tumultueux d’Andravoangy.
Rasoa a les cheveux courts, est maquillée et porte une robe et des chaussures Á talons même quand elle travaille. C’est dans une deux chevaux qu’elle parcourt les rues et ruelles de la capitale Á la recherche de clients. «Ce n’est pas toujours facile d’en trouver car Antananarivo est une grande ville où il y a beaucoup de monde, beaucoup de taxis. Mais les femmes peuvent être plus rassurées de faire un trajet avec une femme comme chauffeur. Mais c’est loin d’être un métier facile, même si j’y mets tout mon cÅ“ur, » dit-elle.
La famille de Rasoa est engagée dans le secteur des transports Á Madagascar. Ses sept frères sont tous camionneurs. Donc, être chauffeur est une suite logique pour elle. Mais au départ, Rasoa a essayé d’autres métiers. A un moment, elle se voyait exercer comme pasteur mais après son baccalauréat, elle est devenue enseignante de littérature malgache. Elle aimait cette profession mais avait du mal Á faire la part des choses entre ses élèves et sa famille. «Éduquer les enfants me plaisait beaucoup mais le hic est que cela prenait tout mon temps. Il ne m’en restait plus vraiment pour ma famille. J’ai réfléchi et je me suis dit qu’entre éduquer des élèves et ma famille, ma priorité devait être claire. C’est pour cela que j’ai abandonné la profession d’enseignante au profit du volant. »
Elle l’a entrevu également comme un genre de pari. «Il était important pour moi de démontrer que dans cet univers d’hommes, je pouvais très bien m’en sortir, sans renier ma féminité. Il est nécessaire de soigner son look quand on exerce un métier de service. Ce n’est pas parce que je suis femme et chauffeur de taxi que je ne dois plus être soignée et tirée Á quatre épingles. Je veux absolument conserver mes qualités féminines. »
Maintenant qu’elle est son propre patron, Rasoa décide de ses horaires de travail. «Je prends des vacances quand je veux. J’ai désormais du temps pour ma famille. Mais je suis aussi une bosseuse. Je fais la part des choses entre ma vie familiale et le travail. Les gains quotidiens dépendent de la chance. Ce n’est pas toujours évident de gagner sa vie comme on le souhaiterait, d’autant plus que le carburant et l’entretien de la voiture coÁ»tent cher ».
Il faut savoir que beaucoup d’autres femmes malgaches vivant dans la capitale avaient opté pour le métier de chauffeur de taxi. Mais les réalités malgaches qui sont conservatrices, ont eu raison de leurs désirs. Elles ont raccroché. Rasoa est la seule Á ne pas avoir rendu son tablier. «Je suis une battante et je ne compte pas abandonner cette profession. Je suis la seule femme face Á des milliers d’hommes chauffeurs de taxi mais ce n’est pas mon problème. J’ai un boulot Á faire et je le ferai, peu importe les traditions et les réalités malgaches. Je sais conduire et je le fais aussi bien qu’un homme, si ce n’est mieux. »
Les relations avec les clients ne sont pas toujours faciles mais il y en a qui sont des gentlemen. «J’ai un client que je n’oublierai jamais. C’est un étranger qui était monté dans mon taxi et il voulait que je l’emmène acheter des pizzas. A ma stupéfaction, quand il est ressorti de la pizzeria, il m’en a offert une avec un grand sourire. Cela m’a fait plaisir et encouragé car j’ai pris ce geste comme une appréciation de mon travail. »
Rasoa est devenue très populaire Á Tananarive. En décembre dernier, le magazine mensuel de divertissement «No Comment » lui a consacré une page, rendant hommage Á son courage et Á sa réussite professionnelle. Malgré que les préjugés et les traditions aient la dent dure Á Madagascar, elle reste un exemple pour d’autres Malgaches qui veulent prendre leur destin en main.
Leevy Frivet est journaliste Á Maurice. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.
One thought on “Rasoa: l’unique femme taxi de Tananarive”
bonjour, je serais à Madagascar du 28 mars au 18 avril 2021. Je cherche un taxi pour sortir de Tana et me faire découvrir les environs. Est-ce que les taxis peuvent sortir de la ville, pour aller par exemple à Ambohimanga, ou au lac Itasy et les chutes de la Lily. Pouvez-vous me renseigner, et si c’est faisable, j’aimerais beaucoup le faire avec Célestine (Rasoa). Merci d’avance de votre réponse et de votre aide.
Pierre-Alain