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Goma, 26 novembre : Goma est un chef-lieu de la province du Nord-Kivu et une des provinces Á l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) où le modernisme a du mal Á cohabiter avec la tradition. Certains aspects coutumiers dans cette partie de la RDC relèguent toujours la femme au second plan. Et l’école n’aide pas forcément Á renverser cette tendance. Des chansons et des comptines coutumières sont enseignées Á l’école sans que les autorités éducatives ne tiennent compte du fait qu’elles renforcent les stéréotypes et vont Á l’encontre de certaines lois de la République.
«Que fait papa ? Papa part travailler au bureau. Et que fait maman ? Maman porte le bébé sur le dos, sur le dos… » Ce sont les paroles d’une chanson que fredonnait Marie-Océane, une fillette de quatre ans qui fréquente une école maternelle de la ville de Goma Á son retour de l’école. Elle affirme avoir appris cette comptine le même jour Á l’école. Les affirmations qui relèguent les femmes aux travaux ménagers ou Á la maternité ne reflètent pas la réalité actuelle de la société nord-kivutienne car dans cette province bon nombre de femmes travaillent au même titre que les hommes malgré que ces dernières aient du mal Á se voir attribuer des postes de responsabilité.
Le lendemain, la fillette a osé demander Á sa maman pourquoi elle se rend au travail alors que son institutrice lui a appris que «Maman reste Á la maison pour s’occuper des enfants et préparer les affaires pour papa ». Choquée que des telles comptines soient encore apprises aux enfants Á notre époque, la mère de la petite Océane s’est plainte auprès de l’institutrice de sa fille. Celle-ci, imperturbable, a simplement répondu Á la mère de la gamine qu’il ne lui appartient pas de changer le programme des cours. Et d’ajouter que ces chansons sont enseignées depuis des générations et que ce n’est pas demain la veille que cela va changer. L’institutrice a aussi précisé que ces mêmes chansons ont été enseignées Á des générations d’enfants et qu’elles n’ont pas empêché les femmes d’évoluer et de s’occuper de leurs foyers.
Certains petits garçons de la maternelle ont eu un argument pour provoquer leurs camarades filles. Ils leur disent qu’elles n’ont qu’Á rester Á la maison pour aider leur maman car leur place n’est pas Á l’école. Pierrine, une autre fillette de la maternelle, est rentrée de l’école en pleurs. Elle a expliqué Á sa mère que ses amis d’école se sont moqués d’elle parce qu’elle a osé dire qu’elle serait un jour ministre. «Tu perds déjÁ ton temps en venant Á l’école. Et tu crois maintenant que tu pourrais devenir ministre ? » lui ont-ils demandé en riant.
Florence Kavira, une enseignante du secondaire, estime que ces chansons ne doivent plus figurer dans les programmes d’études de la maternelle car ils véhiculent des stéréotypes. «C’est scandaleux de ne pas reconnaitre les efforts de cette femme qui quitte son lit Á 5h du matin pour aller chercher de quoi vendre en vue de subvenir aux besoins des siens », dit-elle révoltée. En effet, la grande majorité des Congolaises sont celles qui font bouillir la marmite car le chômage bat son plein dans le pays. Qu’elles soient maraichères ou travaillant dans le secteur informel, les Congolaises majoritairement sont les seules Á s’occuper de la survie de leur foyer.
«Selon des études, 80% des familles monoparentales tiennent encore grâce Á la femme. Et enseigner aux enfants que cette personne qui se bat nuit et jour pour envoyer ses enfants et ceux de ses proches Á l’école, les nourrir, les vêtir et payer leurs soins de santé n’a sa place qu’Á la cuisine et Á la maternité, c’est simplement ingrat », s’indigne Nelly Mbangu, une activiste des droits de la femme.
L’Union congolaise des femmes des médias, section du Nord-Kivu, tout comme l’association-mère basée Á Kinshasa, la capitale, est consciente que conformément Á ce qu’est stipulé dans le Protocole de la SADC sur le Genre et le Développement, qui a été signé par l’Etat congolais, des reformes sont en train d’être menées depuis quelques années dans le secteur éducatif. Mais cette association de promotion des droits des femmes dans les médias estime aussi que les programmes d’études de maternelles aussi doivent être revus car si des cours discriminatoires sont toujours dispensés comme c’est le cas de nos jours, les filles ne seront pas en sécurité Á l’école car tous continueront Á penser qu’elles n’y sont pas Á leur place.
Evelyne Luyelo est journaliste en RDC. Cet article écrit dans le cadre de la campagne des 16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre, fait partie du service d’information de Gender Links, qui apporte des perspectives nouvelles Á l’actualité quotidienne.
One thought on “République Démocratique du Congo : Les filles seront en sécurité Á l’école lorsque les programmes scolaires seront revus”
Il faut savoir ce que la femme veut pour bien l’oriente dans ses besois…
Elle est trop délaissée car on s’est pas bien identité ses besoins…
Elle est le droit d’être écoutée…