Zarah Razafimahatratra : l’impensable championne malgache


Date: May 30, 2011
  • SHARE:

Enfant issue d’un milieu modeste, c’est d’abord contre un mur qu’elle a livré ses premières parties et gagné ses premiers points. Et Á  13 ans, alors qu’elle ne parlait couramment que le malgache, c’est Á  Pretoria, en Afrique du Sud, en milieu anglophone, qu’elle est allée poursuivre son destin, les yeux rivés sur une petite balle jaune. Elle est aujourd’hui championne d’Afrique de tennis pour la deuxième saison consécutive.

Qui aurait cru que la petite fille d’un modeste gardien aurait eu un jour un grand avenir en tennis? «C’est impensable mais j’ai eu tout simplement de la chance de grandir et de me lever tous les matins Á  quelques mètres d’un terrain de tennis et d’avoir décroché une bourse en Afrique du Sud. Même si j’avais des parents riches, je ne suis pas certaine que j’aurais fait carrière dans le tennis. Le facteur déterminant a été l’environnement autour duquel j’ai vécu. A Madagascar, plus de la moitié des champions et championnes appartiennent Á  des familles nécessiteuses mais qui vivent le tennis au quotidien », répond Zarah Razafimahatratra

Championne d’Afrique juniors 2010 et 2011, rien, comme nous l’avons dit plus haut, ne prédestinait Zarah Razafimahatratra Á  devenir une grande joueuse de tennis de renommée internationale. Son père Julien Razafimahatratra est le gardien du complexe du club nautique d’Ivato (CNUT). Il a tracé un petit chemin pour sa fille alors que ce sport est souvent réservé aux riches. Profitant des trois courts de tennis Á  quelques pas de sa maison, Zarah trouvait le temps de jouer, même en solitaire, en tapant la balle face Á  un grand mur. Ce fut ainsi Á  ses débuts tennistiques en 2004 alors qu’elle n’avait que dix ans.

«Qu’il ventait ou qu’il pleuvait, Zarah était toujours face Á  son mur en train de taper dans la balle et de la renvoyer bondir contre le mur. Je me suis alors dit qu’elle devait aimer profondément le tennis. Mon seul souci, c’était de trouver les moyens pour l’emmener Á  un haut niveau car mon métier de gardien ne pouvait pas soutenir ses besoins matériels (raquettes, cordages, chaussures, tenues et autres). Après qu’elle ait enregistré quelques bons résultats sur le plan national, les membres du CNUT ont commencé Á  l’aider. C’est ainsi qu’elle a pu s’équiper comme il le faut. Je suis vraiment fier de ce qu’elle a accompli grâce Á  sa passion dévorante pour le tennis », se rappelle son père Julien Razafimahatratra.

Zarah s’illustre alors dans la catégorie benjamine sur le plan national et finit par partir pour une première expérience internationale et remporter un tournoi réservé au moins de 13 ans Á  Harare, Zimbabwe, en 2007. De retour Á  Madagascar, la joueuse profite du séjour de l’expert de la fédération internationale de tennis, Karl Davies, pour se faire remarquer par lui. Il est Á  Madagascar pour dénicher les futurs champions qui pourront intégrer le centre d’entraînement de la fédération internationale de Pretoria. Après seulement un après-midi d’entraînement sur les courts de l’université d’Antananarivo, l’expert est conquis par le talent et le potentiel de Zarah.

«Je me rappelle toujours de cet après-midi lÁ . J’étais venu Á  Madagascar pour une séance de détection mais ce n’était pas obligatoire de trouver impérativement quelqu’un pour intégrer le centre de Pretoria. Mais quand j’ai vu Zarah sur le terrain en train de se dépenser Á  200%, je me suis dit, cette joueuse lÁ , elle en veut et a de l’avenir. Je l’ai poussée Á  bout en lui donnant une série d’exercices lourds et fatigants, mais elle en redemandait toujours. C’est cette volonté qui m’a fasciné plutôt que sa technique de frappe ou son jeu de jambe.
Et c’est de cette façon qu’on a décidé au niveau de la fédération internationale de lui offrir une bourse Á  Pretoria », se rappelle Karl Davies, toujours expert de la fédération internationale de tennis, chargé de la zone de l’Afrique australe depuis maintenant quatre ans. C’est de cette façon que Zarah a gravi progressivement les marches qui l’ont menée vers les sommets au niveau de l’Afrique.

«Il y a quatre voies d’accès pour atteindre un tennis de haut niveau. Avoir des parents très riches, avoir des parrains aux reins financièrement solides, avoir le soutien de l’État ou intégrer le centre de la fédération internationale de tennis de Pretoria », explique Rafolomanantsiatosika Ravalitera, ancien directeur technique national de la Fédération malgache de tennis.

C’est par cette quatrième porte que Zarah y a eu accès et s’est épanouie pleinement Á  lors de cette formation. Elle en est Á  sa quatrième année d’études actuellement. Lorsqu’elle a quitté Madagascar, elle n’avait que 13 ans et ne connaissait que le français. Elle a dÁ» se mettre Á  l’anglais pour pouvoir converser avec ses congénères du centre de Pretoria. «C’était dur d’apprendre l’anglais. Mais après les trois premiers mois, j’ai réussi Á  le parler correctement. Mes camarades étaient lÁ  pour me corriger Á  la moindre faute et maintenant, je n’imagine pas comment je ferai sans eux. Nous sommes Á  14 actuellement au centre et nous sommes comme une petite famille qui a des règles Á  suivre, des tâches Á  accomplir mais qui savent aussi se divertir et profiter de la vie. »

Zarah, qui a de l’ambition, se voit un jour classée parmi les 128 premières joueuses mondiales. «C’est un rêve fou mais j’espère qu’il deviendra un jour réalité. En tous les cas, je ferai tout pour… »

 


Comment on Zarah Razafimahatratra : l’impensable championne malgache

Your email address will not be published. Required fields are marked *