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CSW57, 6 mars: Il n’y a pas que la tradition Á être responsable des mariages précoces. Ces unions forcées sur des fillettes sont aussi liées Á la pauvreté et Á la survie après une catastrophe. Si l’on veut mettre un terme Á cette forme de violence qui prive les fillettes de la jouissance de leur enfance et les expose Á toutes sortes d’atrocités, il faut non seulement investir dans leur éducation, dans des subventions Á leurs familles mais aussi dans des campagnes d’explications sur les séquelles physiques du mariage précoce.
C’est ce qui est ressorti d’une session sur le sujet qui s’est tenue hier matin au Church Centre des Nations Unies. Initiée par la World Vision (WV) qui a lancé son rapport sur le sujet intitulé «Untying the knot », cette session a vu la participation de Lynne Featherstone, ministre délégué au développement international de la Grande Bretagne qui a appelé les Etats membres des Nations Unies (NU) Á s’engager contre le mariage précoce.
Statistiques Á l’appui, Francesca Moreti, experte de l’Unicef, a déclaré qu’une fille sur trois dans le monde a subi un mariage précoce et qu’actuellement, 400 millions de femmes dans la tranche d’âge des 20 Á 49 ans, ont été mariées alors qu’elles étaient encore mineures. De l’autre côté, a-t-elle ajouté, il y a une prise de conscience de la part des Etats membres des NU qui ont réalisé qu’ils ont l’obligation d’y mettre un terme.
Le mariage précoce n’est pas qu’une tradition ou une norme sociale visant Á veiller que la fille n’ait pas d’enfant hors mariage ou qu’elle bénéficie d’un protecteur. Il y a un lien entre le mariage précoce et l’éducation car les parents forcent leur fille Á arrêter l’école pour se marier. Pour changer cette situation, il faut non seulement investir dans l’éducation, renforcer les lois contre le mariage précoce et faire les gouvernements prendre position contre, il faut aussi réunir les communautés qui ont recours au mariage précoce et leur expliquer les conséquences de cet acte sur leur fille. «Il y a certains pays qui ont opéré un changement radical en la matière comme par exemple l’Etat du Rajasthan en Inde où la sensibilisation n’a pas touché des familles individuelles mais des villages entiers où les habitants ont pris l’engagement de ne plus appliquer cette coutume. Comme ne pas marier leur fille représente un manque Á gagner pour de nombreuses familles, les gouvernements devraient dans la foulée subventionner les mariages des filles Á partir de 18 ans pour faire comprendre Á tout le monde que c’est ainsi que les choses doivent se passer ».
Erica Hall, de WV de la Grande Bretagne, a fait ressortir que l’étude menée par son organisation dans 25 pays, a souligné la corrélation entre le mariage précoce et les situations d’urgences. «Au Bangladesh, 62% des filles ont été mariées durant les 12 mois suivants le passage du cyclone Sidr en 2007. Le système de protection des enfants dans ce pays s’était alors effondré alors que dans ces moments-lÁ justement, ces mécanismes doivent être renforcés », a-t-elle dit en précisant qu’actuellement en Syrie, les systèmes de protection des enfants est tordu, ce qui incite davantage de parents Á marier leur fillette encore mineure parce qu’ils sont persuadés qu’il s’agit lÁ de la meilleure option pour elle.
Tous les parents de la Somalie, du Tchad et du Bangladesh ayant eu recours au mariage précoce pour leur fille et qui ont été interrogés par la WV dans le cadre de cette étude ont dit qu’ils l’avaient fait pour survivre. Les autres raisons poussant les parents Á le faire sont les déplacements des familles dans les camps de réfugiés en période de conflit. «Le financement en faveur du système de protection des enfants est donc critique. Il faut nous assurer que les réponses humanitaires ne consistent pas qu’en des dons alimentaires mais que la totalité des fonds destinés au financement des systèmes de protection soit allouée et non pas partiellement. »
Cette session présidée par Tim Costello, directeur général de WV Australie, a aussi entendu le témoignage poignant de Himaiya Akter, jeune Bangladaise de 16 ans, qui a réussi Á échapper au mariage précoce. Elle a expliqué que d’après la loi en vigueur dans son pays, toute fille n’a pas le droit de se marier avant 18 ans et tout garçon avant 21 ans. Il y a même des pénalités prévues pour les contrevenants. Or, dans la pratique, la loi n’est pas respectée en raison de l’extrême pauvreté. En effet, 80% des familles bangladeshi vivent en dessous du seuil de pauvreté alors que l’analphabétisme touche près de la moitié de la population.
Ayant perdu plusieurs de ses amies des suites d’un mariage précoce, Himaiya Akter déclare que ses parents ont réalisé qu’il était important pour elle de continuer ses études. De l’autre côté, elle a affirmé que le gouvernement bangladais s’est rendu compte du mal que faisait le mariage précoce et diffuse des émissions radios pour conscientiser les gens contre ce type de pratiques coutumières. Mais elle estime que le gouvernement doit aussi faire appliquer dans toute sa rigueur la loi contre les mariages précoces.
Himaiya Akter pense qu’il faut subventionner l’éducation des filles pour que les parents continuent Á les envoyer Á l’école et qu’elles puissent gagner leur vie et ainsi contribuer aux revenus familiaux. Si sa grand-mère s’est mariée Á neuf ans, sa mère Á 17 ans, elle sait qu’elle le fera Á l’issue de ses études.
Marie-Annick Savripène est journaliste Á Maurice et éditrice du service de commentaires et d’opinions de GL en français. Cet article fait partie de la couverture spéciale accordée Á la CSW57 Á New York.
📝Read the emotional article by @nokwe_mnomiya, with a personal plea: 🇿🇦Breaking the cycle of violence!https://t.co/6kPcu2Whwm pic.twitter.com/d60tsBqJwx
— Gender Links (@GenderLinks) December 17, 2024
Comment on Faire les Etats membres s’engager contre le mariage précoce