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CSW 57, 6 mars: Quelque soit le pays dans lequel elles vivent, les femmes et les filles n’échappent pas Á la violence sous toutes ses formes. Mais si dans la culture asiatique, on avait tendance Á ne pas en parler pour préserver l’honneur des familles, de plus en plus de femmes de l’Asie et du Pacifique osent dénoncer les sévices qu’elles ont subis. Ce qui permet de prendre le pouls du mal et recueillir des données sur son ampleur.
Ainsi, depuis 2007, la Corée du Sud effectue des études sur la violence envers les femmes et les filles et ce, tous les trois ans. Le dernier exercice datant de 2010 a permis de voir qu’il y a plus de six millions de Coréennes qui subissent la violence de la part de leur conjoint et que la violence émotionnelle est la plus récurrente, suivie d’assez près par la violence physique.
Les causes principales de cette violence sont une incompatibilité de caractères, des problèmes financiers, la consommation de l’alcool et l’intervention des beaux-parents. Dans plus de la moitié des cas, les auteurs de ces actes barbares sont d’anciennes victimes de violence durant l’enfance, quand ils n’en sont pas les témoins dans leur milieu familial, a expliqué hier Mijeong Lee de la Korean Women’s Development Institute lors de la session consacrée Á la violence en Asie-Pacifique au Church Centre des Nations Unies.
Du côté de la ThaÁ¯lande, ce sont 800 0000 femmes et enfants qui ont fait l’objet de trafic humain Á des fins de travail sexuel et d’autres formes d’exploitation. La représentante de la ThaÁ¯lande, Monthip Sriratana Tabucanon, principale inspectrice générale au ministère de l’Environnement thaÁ¯landais, a eu beau donner des détails Á propos toutes les mesures prises par le gouvernement thaÁ¯landais pour empêcher la traite des femmes – durcissement des législations, négociations avec les pays riverains pour un meilleur contrôle des frontières, aménagement de centres pour les femmes battues, pour ne citer que ceux-lÁ , le fait brut demeure que les lois ne sont pas appliquées Á leur juste mesure dans ce pays et nulle part ailleurs.
Le pays asiatique qui semble bien décidé Á sévir contre les auteurs de violences envers les femmes et les filles, c’est l’Inde. VoilÁ un pays qui a obtenu son indépendance il y a 56 ans mais où les femmes et les filles étaient encore maltraitées et violentées. Les statistiques livrées au cours de la session d’hier par le Dr Ranjana Kumari, directrice du Centre for Social Research en Inde sont sans appel: 34% des Indiennes ont connu une forme de violence une fois dans leur vie. L’avortement sélectif a privé 600 000 bébés de sexe féminin de naître Á terme – le journal scientifique The Lancet estime ce chiffre Á 10 millions. Il y a eu 8618 cas de décès féminins liés Á la dot qui ont été rapportés Á la police en 2011. Lors de la même année, 43% des femmes tombant dans le groupe d’âge des 20 Á 24 ans ont été forcées de se marier alors qu’elles étaient encore mineures. Il y a eu 99 135 cas de violence domestique rapportés en 2011, de même que 24 206 viols, 42 968 cas de molestations, 8570 cas de harcèlement sexuel.
Jusqu’ici, les lois existantes étaient peu appliquées malgré les chiffres cités plus haut. Il a fallu le viol atroce et le meurtre non moins horrible d’une étudiante de 23 ans Á New Delhi le 16 décembre dernier pour que la population indienne se révolte et que l’on frise l’insurrection, pour que le gouvernement indien confie Á J. S. Verma, ancien chef juge de la Cour Suprême, la tâche de mettre sur pied une commission pour revoir les lois sur les violences sexuelles et venir de l’avant avec des recommandations.
Le rapport Verma, prêt dès la mi-janvier dernier, est novateur Á plus d’un titre. En effet, pour la première fois dans l’histoire de l’Inde où la violence envers la femme est institutionnalisée Á travers les structures familiales, dans les schémas économiques, culturels et traditionnels, la commission Verma est venue donner Á la femme les pleins droits sur son corps.
Ainsi, il a été notamment demandé dans ce rapport que la version du viol soit élargie et que le viol conjugal y figure, que l’on abandonne dans les lois relatives au viol les références liées au genre afin d’y inclure de viols d’hommes et de personnes transgenres, la punition pour le voyeurisme, les attaques Á l’acide et que tous les mariages soient enregistrés pour prévenir le mariage précoce, de même qu’une révision relative Á la traite des personnes.
Mais la commission Verma a été plus loin et a osé toucher Á la sacro-sainte immunité accordée aux policiers accusés de torture et de violence envers les femmes en garde Á vue et aux membres de l’armée en zones de conflits.
Le gouvernement indien a promis de faire de ces recommandations une priorité. L’Histoire dira si l’Inde nous fera la leçon ou pas.
Marie-Annick Savripène est journaliste Á Maurice et éditrice du service de commentaires et d’opinions de GL en français. Cet article fait partie de la couverture spéciale accordée Á la CSW57 Á New York.
Comment on CSW 57: L’espoir viendra-il de l’Inde?