Repeupler les lagons mauriciens

Repeupler les lagons mauriciens


Date: December 2, 2011
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Cette mesure budgétaire de Xavier Luc Duval, ministre des Finances mauricien, visant Á  repeupler les lagons mauriciens appauvris par une surexploitation, par la pollution mais aussi par le réchauffement climatique, est diversement accueillie. Celui-ci a accordé une enveloppe de Rs 10 millions Á  cet effet, soit environ 2,5 millions de rands. L’enjeu est écologique mais aussi économique car le poisson se fait rare. La vie devient de plus en plus dure pour les pêcheurs et pour leurs familles, surtout en raison du changement climatique.

Les autorités veulent relâcher 300 000 alevins, des crevettes et des milliers de holothuries, plus connus comme des bambaras ou concombres de mer. Cet animal est présent dans presque tous les océans du monde et se présente sous différentes couleurs, allant du brun au vert-olive, en passant par le noir. Son poids se situe entre 350 et 600 g, pour une longueur qui peut atteindre jusqu’Á  35 cm. Le concombre de mer se nourrit, en général, de petits sédiments ou de matières en suspension. Ce curieux animal prend plaisir Á  s’enfouir sous la vase ou le sable, ne laissant que l’extrémité de son corps visible. Très prisé dans la cuisine asiatique, les Chinois lui prêtent certaines vertus médicinales comme celle de nettoyer l’estomac et de faciliter la digestion. En soupe, il serait un régal.

Mais selon la Food & Agricultural Organisation (FAO), l’exploitation de cet invertébré marin dans l’Océan Indien a été catastrophique ces cinq dernières années. Les autorités qui ont conscience des opportunités économiques qu’offre l’exploitation du bambara s’attèlent depuis 2006 Á  appliquer une gestion raisonnable en parallèle Á  des études sur les stocks disponibles.

Malgré cela, la collecte illégale et intensive de bambara continue. Agaléga et Rodrigues, îles qui font partie de Maurice, ne sont pas épargnées et la surveillance y est moins efficace qu’Á  Maurice, qui souffre déjÁ  de la surexploitation des concombres de mer. Le bambara coÁ»te plus de Rs 800 le kilo, soit 200 rands. En 2009, une cargaison d’une valeur de Rs 2 millions a été saisie, soit environ 500 000 rands.

Pour la présidente de la Mauritius Marine Conservation Society (MMCS), Jacqueline Sauzier, la décision de réimplanter des milliers de bambaras tout autour de l’île est une louable initiative mais le facteur principal sera de veiller au grain. « Il faut attaquer le problème Á  la source, car avant de relâcher des alevins, il faudrait améliorer la qualité des eaux, contrer la pollution, préserver les coraux, conscientiser les pêcheurs et tous les usagers de la mer », explique-t-elle.

Pour l’océanographe et ingénieur en environnement, Vassen Kauppaymuthoo, « les écosystèmes marins ont été durement mis Á  l’épreuve pour les besoins du développement ». Il craint que l’annonce budgétaire ne soit qu’une déclaration d’intention puisque « la réalité est celle des lobbies et des exigences économiques ».

Judex Ramphul, président de l’Association des Pêcheurs de Maurice craint qu’on « va repeupler le lagon pour les braconniers ».

Le dépeuplement des lagons n’est pas dÁ» qu’Á  la ponction de poissons et de bambaras par de petits malins. Il est également dÁ» au changement climatique. « Une pêche durable demeure l’un des principaux défis de ce secteur, » selon Nicolas Von Mally. Le ministre de la Pêche participait Á  une conférence axée sur l’ouverture du festival du poisson. De belles déclarations qui ne doivent toutefois pas rester d’intention.

Jimmy Jean-Louis est journaliste Á  Maurice. Cet article fait partie du service d’opinions et de commentaires de Gender Links qui apporte des perspectives nouvelles Á  l’actualité quotidienne.


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