Intégrer le genre dans son travail: une lutte perpetuelle pour la lauréate Bestina Magutu

Fin 2008. La nouvelle lui tombe sur la tête. A peine a-t-elle le temps de réfléchir qu’elle doit se rendre en Afrique du Sud pour recevoir son trophée lors du troisième Sommet sur le Genre et les Médias. Sa réaction d’alors? Elle est surprise mais heureuse naturellement. «Je ne m’y attendais vraiment pas. J’ai juste envoyé cet article sur les barrières qui empêchent les femmes de s’instruire. Je l’ai fait sans arrière pensée. L’essentiel était de participer. »

Cet article publié par le service de commentaires et d’opinions de Gender Links a plu au jury tant par sa forme que par le sujet crucial qu’il aborde. «J’ai écrit cet article après avoir suivi la formation Businness Unusual organisée par Gender Links en Tanzanie. C’était une sorte d’atelier de travaux pratiques. J’ai parlé d’un programme spécial qui vise Á  encourager les jeunes filles Á  suivre des études scientifiques auprès de l’Université de Tanzanie. Il s’agit donc de former de manière intensive ces jeunes filles qui n’avaient pas les notes nécessaires pour accéder aux études supérieures et ensuite leur faire passer un test pour certifier que leurs acquis sont valables et les admettre dans les cours universitaires. J’y ai trouvé un intérêt particulier car il y a tant de femmes qui ne sont pas suffisamment formées que j’estime qu’il sera difficile pour elles d’assumer certaines fonctions ».

Les membres du jury ont sans doute été conquis eux aussi par ce programme permettant l’autonomisation des jeunes filles. Ils ont désigné cet article comme le meilleur. A l’issue de cinq ans de collaboration antérieure avec Genders Links, ce trophée a permis Á  Bestina Magutu d’avoir une plus grande confiance en elle et dans son travail. Il l’a motivée Á  se dépasser. «Grâce Á  ce trophée, j’ai réalisé que mon travail était bon. Je pense que cette récompense m’a aussi permis d’intégrer l’approche genre dans mon travail de tous les jours et en particulier dans la collecte de l’information. »

Mais pour Bestina Magutu, comme pour beaucoup d’autres femmes dans le monde, l’intégration du genre, surtout dans le traitement de l’information, reste un idéal Á  atteindre au prix de maints efforts. «C’est difficile pour moi d’écrire chaque fois en tenant compte de l’approche genre. A la Tanzania Broadcasting Corporation où je travaille, mon rédacteur en chef a un droit de regard sur mon travail et il n’est pas toujours d’accord avec moi. Alors parfois, je suis obligée de faire des concessions mais c’est un perpétuel combat entre lui et moi par rapport au genre. »

Entretemps, Bestina Magutu fait partie d’une association de femmes journalistes et c’est lÁ  qu’elle produit le plus grand nombre d’articles qui respectent l’approche genre. «Au sein de la Tanzania Media Women Association, je peux écrire pour faire avancer la cause du genre. Ces articles sont publiés dans le magazine de l’association mais aussi dans d’autres journaux. Cela permet Á  un plus grand nombre de personnes de me lire et d’intérioriser un peu plus les questions liées au genre. Je continue aussi Á  écrire pour Gender Links car son lectorat est plus large puisqu’il a un site sur Internet et c’est aussi une opportunité pour moi d’être lue Á  travers le monde. Je continue mon combat. » C’est dit!