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Le développement durable n’engage pas seulement les hommes malgaches. Il nécessite également la participation des femmes malgaches. Celles-ci, conscientes des enjeux de la préservation de la nature, se sont impliquées, aux côtés de leurs homologues masculins, dans l’application du projet «Tetik’Asa Mampody Savoka » ou TAMS – un projet de restauration des forêts épargnées des feux de brousse et de la culture sur brÁ»lis – initié en 2003 par Conservation International dans la commune rurale d’Andasibe, située Á 145 kilomètres de la capitale Antananarivo.
Le projet concerne plus particulièrement la restauration des forêts figurant dans le corridor Ankeniheny-Zahamena (CAZ), incluant les forêts de Mantadia, de Vohimena, de Vohidrazana, de Maromizaha, du Parc National d’Andasibe Mantadia et de Mitsinjo, et pour y parvenir, les paysans concernés par le projet se mobilisent dans des Sustainable Livelihoods Activities (SLA), activités reposant sur l’agriculture, l’élevage, l’artisanat et l’écotourisme et qui leur permettent d’améliorer leurs revenus et leurs conditions de vie.
La participation des femmes Á la préservation de la biodiversité leur sera bénéfique si on ne pense qu’aux richesses qu’hériteront leurs enfants grâce Á la conservation et au maintien de ce qu’elles ont accompli.
Travail de technicienne
Pour être une technicienne et être au service des villageois, il faut des compétences et une bonne connaissance du terrain. Ils ne sont pas beaucoup Á choisir cette profession car le travail est difficile. Armée de sa bonne volonté, un technicien(ne) doit parcourir 11 villages et trois fokontany dans la commune rurale d’Andasibe pour prendre en main l’éducation et la sensibilisation de quelque 200 hommes et femmes impliqués dans ce projet de restauration des forêts.
C’est le cas d’Honorine Rasoanandrasana, technicienne auprès de l’Association Nationale d’Action Environnementale (ANAE), qui est simultanément une des gestionnaires du projet TAMS. Elle explique qu’en s’engageant dans une SLA, les paysans s’installent sur un terrain où ils peuvent travailler en permanence et en toute tranquillité. «Il s’agit de faire travailler les terres pour qu’elles deviennent arables.
Une fois que les paysans arrivent Á les labourer et Á récolter des fruits, ils peuvent soumettre une demande auprès des communes pour devenir propriétaires dudit terrain. Les cultivateurs ont bénéficié de sommes d’argent pour qu’ils puissent installer des pépinières. Certains d’entre eux ont obtenu des équipements, des semences et des engrais pour le bon démarrage de leurs activités.
Différents techniciens appuient les bénéficiaires dans leurs techniques agricoles. Dans un premier temps, ils s’initient au procédé du zéro labour, avance-t-elle. Les techniques agricoles s’appuient en général sur l’apprentissage des méthodes de base, Á savoir le calcul de la courbe de niveau, la mise en terre Á proprement dite et le suivi de chaque culture.
Les techniciens ont effectué un encadrement des paysans pour une durée de six mois et lors d’une inspection sur le terrain qui a eu lieu le mois dernier, le chef de projet n’a pas manqué de démontrer l’efficacité de l’initiation de quelques agricultrices.
Norine Louisette, satisfaite du projet
A cinq kilomètres de la bifurcation menant vers Andasibe, toujours sur la Route Nationale 2 vers Toamasina, se trouve le fokontany de Morafeno. La majorité des habitants de cette localité se concentre principalement sur l’exploitation des carrières. Norine Louisette, agricultrice et épouse du chef fokontany, a choisi de s’investir dans la culture vivrière en se conformant aux techniques de l’ANAE dans un endroit particulier, Á savoir Á 500 mètres d’altitude.
A première vue, il s’avère difficile d’imaginer qu’une culture pourrait survivre Á si haute altitude où il fait froid. Pourtant, ce que Norine Louisette a mis en terre Á cet endroit est une exception. «Cela fait des années que nous avons pratiqué la culture sur brÁ»lis. Une sensibilisation menée par les associations oeuvrant pour la protection de l’environnement dans notre fokontany nous a ouvert les yeux. Nous étions convaincus que notre survie dépendait des ressources naturelles qui nous entourent. Or, depuis octobre dernier, j’ai commencé Á mettre en terre des graines de mucuna, communément appelées pois mascate qui se transforment en plantes grimpantes et qui servent de couverture végétale.
J’ai également aménagé le terrain de façon Á obtenir une courbe de niveau que j’utilise pour la fouille d’un canal antiérosif et dans lequel je plante du stylosanthes en guise de haie vive qui retient le sol. Il s’agit d’un excellent fourrage, riche en protéines, qui reste vert et pousse pendant la saison froide et sèche. Vers le mois d’aoÁ»t, cette couverture végétale se détériorera et elle deviendra un bon fertilisant qui peut produire jusqu’Á deux tonnes de biomasse. Je n’aurais plus Á travailler la terre et il ne me restera plus qu’Á sarcler et Á semer les graines de mon choix. Pendant l’hiver, mon mari et moi allons opter pour la culture de haricot et de maÁ¯s. L’année prochaine, nous pourrons varier les cultures en alternant les cacahuètes, le riz et le maÁ¯s et la rotation de cultures améliorera également notre rendement », raconte-t-elle.
Cette jeune femme a par ailleurs souligné que bien que le projet soit tout récent, elle garde confiance et espère que d’ici quelques temps, les récoltes lui rapporteront une jolie somme d’argent car elle envisage de se dévouer Á l’économie de marché.
La culture « pêle-mêle », un nouveau style
La commune rurale d’Andasibe regorge des paysans talentueux qui font preuve d’originalité. Dans le fokontany d’Anevoka et plus précisément sur une parcelle de démonstration installée conjointement par le Groupe d’Etudes et de Recherches des Primates de Madagascar (GERP), l’ANAE et Conservation International, un couple a eu l’idée de se concentrer sur une technique dite « Volin’Ikala Adala » qui peut se traduire par une sorte de culture ‘pêle-mêle’.
Dans ce champ de démonstration, les arbres fruitiers poussent aux côtés des légumineuses et de certains légumes. Soatalata, une femme rencontrée dans ce champ, apporte quelques éclaircissements par rapport Á la technique qu’elle a adoptée.
«Cela fait deux ans que nous avons démarré le projet. Nous n’avions jamais eu l’habitude de labourer mais avec un peu de volonté et d’énergie, nous avons aménagé les flancs pour organiser l’agencement des arbres des forêts et des différentes cultures. Il s’agit de disposer ensemble le tarot, le manioc, le haricot, les tomates. Pendant toute l’année, la récolte est possible et est étalée sur trois, six, huit et neuf mois. Les végétales se complètent et les apports calorifiques de certains nourrissent les autres et ils enrichissent la qualité du sol », affirme-t-elle.
Dans un futur proche, cette parcelle de démonstration fera l’objet d’un projet d’écotourisme. Des infrastructures seront installées pour que les visiteurs puissent goÁ»ter aux fruits et légumes récoltés ou encore aux poissons qui nagent dans le lac sur le bas-côté. L’écotourisme sera un des moyens visant Á réduire l’émission de gaz Á effet de serre par les touristes qui viennent Á Madagascar en avion et ceux qui empruntent la RN 2.
L’argent perçu comme droit d’entrée soutiendra d’une part les activités des communautés de base dans le cadre du projet de restauration des forêts et offrira d’autre part d’intéressants revenus aux paysans pour qu’ils n’aient plus Á accomplir l’exploitation massive et illégale des ressources naturelles.
Volana Rasoanirainy est journaliste Á Tribune de Madagascar. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.
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— Gender Links (@GenderLinks) March 5, 2025
Comment on A Andasibe: les femmes malgaches associent agriculture et protection de l’environnement