Il faut saluer le courage des femmes malgaches


Date: June 19, 2010
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Madagascar est en crise politique depuis mars 2009 et les femmes malgaches ont souffert de cela et leurs douleurs ne sont pas prêtes Á  finir. Mais avant le changement anticonstitutionnel, qui n’est pas reconnu par la communauté internationale, le Dr Hanta Andrianasy rappelle qu’il y avait le problème de la faible représentation des femmes en politique dans la Grande île.

Selon elle, la femme Á  Madagascar est encore considérée comme devant rester au foyer, Á  s’occuper des enfants et c’est un fait qu’elles ont encore peur de la réaction de leur mari ou leur père. Et elle ajoute que c’est ce genre de perception qui empêche les femmes de pénétrer la sphère politique.

Cette perception évolue cependant au niveau de toutes les catégories de la population. « Les femmes, qu’elles soient instruites ou pas, comprennent maintenant la nécessité d’avoir du pouvoir pour faire bouger les choses. Les hommes sentent aussi qu’ils ne peuvent plus se passer de la contribution des femmes et qu’ils ne pourront plus contenir la pression exercée par les femmes pour un partage de pouvoir. Les efforts des différents intervenants de la crise actuelle ont influencé l’évolution de cette perception ».

Quand on lui demande pourquoi les femmes hésitent-elles Á  s’engager en politique, elle affirme qu’a Madagascar, la politique est connue pour être une bataille d’hommes. «En malagache, on dit “adilahy politika”, ce qui veut dire que “la politique est une bataille entre hommes” mais cet adage sous-tend deux points essentiels: c’est masculin, écartez-vous les femmes! Ou encore: c’est la guerre, c’est trop dangereux pour les femmes ou bien: ça fait peur…et il y a de quoi, si on considère l’inexistence de système efficace qui garantit la liberté d’expression. L’éducation y est pour beaucoup et s’ajoute Á  cela les coutumes, la religion entre autres. Par exemple, ce dicton très connu ici qui affirme que la femme ne connaît que les casseroles et les chiffons alors que l’homme est Á  la tête du ménage, ou le dicton: “La poule ne chante pas, seul le coq chante!” ».

Outre la Friedrich Ebert Stiftung, le Dr Andrianasy est aussi membre fondatrice et secrétaire générale sortante de SIMIRALENTA (Centre d’observation et de promotion du genre) et ancienne présidente de l’Association Homéopathes Sans Frontières et de la Fédération Internationale des Homéopathes Sans Frontières.
Elle affirme que les actions de SIMIRALENTA avec FES ont consisté Á  entamer des discussions pour changer les perceptions négatives Á  l’égard des femmes et pour changer les structures.

Mais les femmes malgaches sont pour le moment plus concernées et affectées par la crise politique qui secoue leur pays. Néanmoins, de nombreuses femmes malgaches ont eu l’opiniâtreté de se battre malgré cette crise, soutient le Dr Andrianasy qui salue leur courage. « La crise a été une pression pour le changement en général, pour la démocratisation. La crise est également une charge de plus, plutôt pour la femme que pour l’homme car la femme s’est sentie plus motivée Á  intervenir. La crise a aussi montré l’inefficacité des hommes seuls, alors pourquoi pas des femmes en politique ? On voit de moins en moins de sourires ironiques quand on parle de parité, autant parmi les journalistes que les politiciens et même les citoyens. En tout cas, ils le font peut être en aparté, mais pas publiquement ».

Elle regrette cependant que les structures de la transition intègrent encore très peu de femmes, c’est-Á -dire encore moins que sous le régime précédent. «Quand il y a des violences politiques, les femmes dirigeantes essaient de calmer le jeu, de trouver un terrain d’entente. Ce qui ne plaît pas Á  leur supérieur. Elles sont très vite limogées comme cela Á  été le cas de la ministre de la Communication récemment, voire violentées comme l’a expérimentée l’an dernier la ministre de la Défense. Mais je suis convaincue que rien ne vaut la complémentarité entre hommes et femmes mais les femmes ont aussi besoin de se retrouver, d’apprendre Á  s’épauler, de faire entendre leur voix Á  l’égal des hommes ».

Le Dr Andrianasy estime que le référendum constitutionnel qui a été annoncé par le gouvernement de transition pour aoÁ»t 2010 est une occasion Á  ne pas rater pour les femmes malgaches. « C’est dans l’intérêt du pays tout entier, pas seulement pour celui des femmes, même s’il faut reconnaître et dénoncer le fait que le principe d’égalité des sexes existe mais ne se traduit pas dans le concret, notamment sur trois points et qui pourraient être intégrées dans ce référendum. Cela concerne le quota pour les nominations et les listes électorales, la scolarisation des filles et l’éducation des hommes et des femmes aux questions de genre et que le principe d’égalité des sexes se traduise aussi en termes de ressources et de lois des finances intégrant le genre ».

Le Dr Andrianasy est persuadée que les femmes malgaches peuvent apporter leur contribution pour sortir leur pays de ce gouffre politique qui n’a trop duré.

Leevy Frivet est journaliste Á  Maurice. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.

 


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