Les hommes également devraient se soumettre Á  des tests de fertilité


Date: January 1, 1970
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Les hommes également devraient se soumettre à des tests de fertilité
 
Par Arthur Okwenba
 
Une caractéristique exaspérante mais pourtant répandue au sein de notre société est comment le blâme est placé sur le dos de la femme à chaque fois que quelque chose va mal, en particulier dans les relations. Ceci est particulièrement douloureux quand les couples sont incapables de concevoir un enfant. Le jugement défavorable est toujours dirigé vers la femme. Elle est alors contrainte de se soumettre à une batterie d’examens et de tests de fertilité et de passer d’un médecin à l’autre juste pour déterminer si elle est capable d’enfanter.
 
De plus, elle doit faire face aux critiques de sa belle-famille quant à son incapacité à leur donner un petit enfant. Dans d’autres cas, le mari, sur l’insistance de sa famille ou de son propre chef, peut décider d’épouser une deuxième femme capable elle de réussir là où sa première femme a échoué.
 
Cependant, alors que tout ceci a lieu, il est rare que des questions soient soulevées à propos de la capacité des hommes à concevoir un enfant ou à se soumettre à des tests de fertilité. Il y a une fausse conception à l’effet que les questions de fertilité sont une affaire de femmes. La société croit que les hommes sont prolifiques, même quand ils n’ont pas de spermatozoïdes ou quand leurs spermatozoïdes sont déformés ou peu mobiles.
 
Après plusieurs conversations avec des hommes et au cours desquelles je leur demande pourquoi ils ne se soumettent pas d’abord à des tests de fertilité avant de pousser leurs femmes à le faire, il m’est venu à l’esprit que la chose que les hommes craignent le plus au monde est d’avoir quelqu’un qui évalue leur taux de fertilité. Même si on les découvre stériles, ils veulent que ce soit le contraire qui soit révélé.   
 
Toutefois, dans bien des cas, les femmes doivent subir des expériences éprouvantes et coûteuses alors que le problème d’infertilité vient de l’homme. De la même manière, le coût de l’analyse du sperme –  le test le plus important pour établir si un homme est fertile ou stérile coûte moins de 20 dollars américains dans la plupart des hôpitaux publics du Kenya et dans d’autres pays africains.
 
Pour la femme inversement, des analyses hormonales et des examens des trompes de Fallope coûtent au minimum 250 dollars américains dans des points de vente privés les moins chers. Eu égard à ces coûts et au fait que près de 50% de l’infertilité vienne des hommes, ne serait-il pas mieux et moins onéreux pour les hommes de se soumettre aux tests de fertilité avant qu’ils ne demandent à leurs femmes ou partenaires de le faire?
 
Mais la grande question est pourquoi est-ce que les hommes placent le poids de la preuve sur les épaules des femmes et ne vont pas faire tester leur infertilité alors que les examens qui leur sont destinés ne coûtent presque rien?
 
 
Troublé par cette interrogation, j’ai décidé de me soumettre à un test de fertilité rien que pour comprendre ses implications et fort de cet expérience, d’encourager les autres hommes à faire de même.
 
Quand j’ai débarqué dans l’un des hôpitaux privés les plus importants de Nairobi et que j’ai demandé à faire une analyse de sperme, les infirmières qui étaient à la réception m’ont regardé avec étonnement et m’ont posé tout un tas de questions: Etes-vous référé par un médecin? Avez-vous des problèmes pour concevoir un enfant? Avez-vous des doutes à propos de votre fertilité? Votre femme va-t-elle bien? Etes-vous sûr de vouloir le faire? Toutes ces questions étaient intimidantes mais j’ai pris mon courage à deux mains et j’ai été de l’avant.
 
Une des infirmières m’a mise en garde en me disant que les questions de fertilité sont très déprimantes et qu’il fallait que je me soumette au préalable à un counselling. Cela m’a agacé car les professionnels de santé ont rarement ce genre de souci quand c’est une femme qui demande à faire un test de fertilité. Elles ne reçoivent ni conseils, ni préparation mentale sur les résultats de tels tests en raison du fait que la société est convaincue qu’être infertile fait partie des problèmes de santé reproductive des femmes.
 
Retour à l’infirmière. Insatisfaite de ma réponse, elle m’a référé à un autre homme qui, pas content à son tour de mes réponses concernant ma motivation, m’a envoyé vers un autre homme qui m’a finalement permis de voir le médecin. C’était une femme.
 
Elle également m’a posé des questions mais a éventuellement demandé au laboratoire de faire le test. Quand j’ai apporté la prescription du médecin au technicien de laboratoire, ce dernier m’a regardé avec étonnement. Il a ensuite murmuré: «Votre cas est particulier. Attendez ici pendant que je prépare la cabine». A ce moment-là, j’étais à bout de nerfs.   
 
Après quelques minutes, l’homme est revenu et m’a fait signe de le suivre à l’écart des autres patients et ce, d’une façon suggérant qu’il y avait quelque chose qui clochait avec moi. Je l’ai suivi dans une pièce qui se trouvait au sous-sol de l’hôpital. Là, trois femmes prenaient le thé. Sans un mot, le technicien de laboratoire leur a fait signe de partir sur le champ. Ensuite, il m’a fait entrer dans une petite cabine qui se trouvait dans la même pièce et où il n’y avait qu’un lit. C’est à ce moment-là qu’il a retiré une fiole de sa poche. 
 
«C’est dans cette bouteille que vous devez placer votre sperme après vous être masturbé», m’a-t-il dit à voix basse. Il m’a offert deux options : le faire dans la cabine où nous nous trouvions ou dans un endroit tout près de l’hôpital du fait que le sperme doit être au laboratoire dans les 30 minutes suivant l’éjaculation. J’ai choisi de le faire hors de l’hôpital.  
 
Cependant, tout ce processus et le secret entourant ce test m’a confirmé beaucoup de choses. Il est tout à fait clair que les fournisseurs des services de santé font partie de ceux qui perpétuent le mythe à l’effet que les questions de fertilité sont des affaires de femmes.
 
Eux également sont à blâmer pour l’intense stigmatisation et la peur entourant les tests de fertilité pour les hommes ou les analyses de sperme. Je me suis dit que si moi j’avais reçu un tel traitement, combien d’hommes auraient le cran de passer par là et d’aller jusqu’au bout.  
 
Parallèlement, ce que j’ai vécu est aux antipodes du traitement accordé à une femme dans le même hôpital. Quand elle s’y présente et demande une analyse hormonale ou un test des trompes de Fallope, personne ne trouve cela étrange. La seule question qu’on lui pose est si elle dispose de l’argent nécessaire pour faire ces tests? Etre femme et infertile est perçu comme quelque chose de normal et même d’acceptable. Pour un homme, c’est déplacé et incorrect.
 
Ces perceptions et attitudes expliquent pourquoi plusieurs femmes ont été sujettes à la violence physique, émotionnelle et verbale par leurs maris et leurs belles-familles lorsqu’elles ont été incapables de concevoir. Alors qu’en réalité, le problème vient de l’homme, qui est habituellement glorifié pour sa virilité prolifique et considéré comme un héro qui doit supporter sa femme stérile.
 
Cet état des choses requiert une attention urgente des hommes et des femmes qui croient dans l’égalité du genre et dans les droits humains de la femme. Une campagne soutenue, destinée à sensibiliser le public et les hommes en particulier, sur la contribution de l’homme dans l’infertilité et sur la nécessité pour lui de subir des analyses de sperme, doit être immédiatement menée.
 
Tant que nous ne présenterons pas la question d’infertilité comme un problème affectant aussi bien l’homme que la femme et que nous ne mettons pas en avant les raisons pour lesquelles l’homme doit soutenir en partie ce fardeau, les femmes demeureront des victimes de ce traitement social injuste.  
 
 
Arthur Okwemba est un journaliste kenyan travaillant avec le African Woman and Child Feature Service. Cet article fait partie du service d’opinions et de commentaires de Gender Links, qui apporte des perspectives nouvelles à l’actualité quotidienne.
 
 


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