Les Malgaches combattent la violence Á  leur égard


Date: May 22, 2010
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A Madagascar, les femmes membres de réseaux se sont mobilisées pour marquer la conférence de Beijing+15. Comme la lutte contre la violence est l’une des sept priorités de cette conférence pour l’Afrique, les femmes malgaches veulent saisir cette chance pour raffermir la lutte.

Une stratégie qui coÁ¯ncide avec la décennie du genre lancée par l’Union africaine au début de l’année. «Il est temps pour Madagascar de se réveiller et de protéger les femmes en partant d’une bonne stratégie. Ainsi, le réseau pour l’éradication de la violence (REV) a organisé Á  la fin avril un atelier d’élaboration de stratégie nationale de lutte contre la violence », explique Mathilde Rabary, présidente nationale des réseaux de lutte contre la violence, répandus dans les 22 régions de l’île, et fondatrice d’un centre d’écoute pour les femmes battues nommé « Fanantenana », mot malgache signifiant espoir. Ce centre est très renommé dans la capitale. Il a ouvert ses portes depuis 2005 pour abriter les femmes victimes du non-droit.

Cet atelier a vu la participation de 70 organisations non-gouvernementales oeuvrant dans l’amélioration des conditions des femmes Á  Madagascar. «L’objectif de cette rencontre est d’uniformiser la conception du cadre logique tournant autour de la violence Á  l’égard de la femme. Nous espérons que ce sera le bon moyen pour enfin éradiquer cette pratique nuisant au bien-être de la femme », a ajouté Mathilde Rabary.

A Madagascar, le respect des droits de la femme est loin d’être réel. Dans certains cas, des femmes sont considérées comme des objets appartenant aux maris. Ce qui occasionne des violences physiques. «Une femme a été poignardée par son mari juste parce qu’elle avait refusé de coucher avec lui pour satisfaire ses désirs », raconte le Dr Jeanne Rasolofonirina, membre du réseau pour l’éradication de la violence dans la région moyen ouest de Madagascar.

Dans l’extrême sud, la polygamie est un désastre car beaucoup d’épouses légitimes sont délaissées par leurs époux. «Madagascar est rouge en matière de violence Á  l’égard de la femme. Il est temps de dénoncer les pratiques entravant les droits de la femme », souligne encore Mathilde Rabary, convaincue de mener Á  bien et jusqu’au bout cette lutte.

Les statistiques officielles révèlent que 65% des femmes sont victimes de maltraitance, selon l’enquête menée en 2007 et publiée en 2008 par l’ONG Enda océan Indien et par l’Institut de recherche pour le développement.
Toutes les catégories de la population sont concernées. Cependant, les jeunes femmes de 15 Á  19 ans ont cinq fois plus de risques d’être victimes de violence physique par rapport aux femmes ayant plus de 50 ans. Et les femmes vivant en union libre courent cinq fois plus de risques que les femmes légalement mariées d’être battues.
Des revenus irréguliers et un logement exigu constituent également des facteurs de risques élevés pour la violence. Enfin, les couples qui s’éloignent des normes sociales établies sont plus exposés Á  la violence, comme les femmes plus âgées et plus instruites que leur conjoint, ou encore les femmes qui sont de religion différente de leur conjoint.
«Il faut que je le cajole quand il est ivre. Il faut que je fasse tout ce qu’il me demande. Je n’ai pas le droit de dire ce que j’ai sur le cÅ“ur. Il me force Á  avoir des relations sexuelles avec lui, et après, il s’endort », souligne Jeanne Ranaivosoa, lavandière d’une quarantaine d’années vivant dans l’un des bas quartiers d’Antananarivo, et qui hebdomadairement des coups de son mari.
Lucie Ranarivelo cherche désespérément un refuge car elle encaisse depuis quelques temps des coups de poings de son mari. «Il me bat de temps en temps, Á  chaque fois que je n’emmène rien Á  la maison. La crise sociopolitique m’a mise au chômage et je n’ai plus d’activités rentables mensuelles », se plaint-elle.
Lucie travaillait autrefois dans une zone franche textile mais depuis la fermeture de celle-ci, elle a dÁ» trouver d’autres occupations informelles pour joindre les deux bouts.
L’enquête susmentionnée a révélé que la violence psychologique est la plus répandue auprès des victimes car elle touche 45% des femmes dans la capitale. La violence psychologique peut s’exprimer sous plusieurs formes : menaces d’abandon, chantage, scènes de jalousie… Certains hommes n’ont pas besoin de frapper pour créer un climat de violence. Toutefois, c’est cette forme de violence qui est la plus répandue Á  Antananarivo.
Comme Lucie, beaucoup de femmes espèrent une solution pérenne Á  la lutte contre la violence conjugale. Une issue pour qu’elles puissent bénéficier de leurs droits en tant qu’individus Á  part entière.
Beaucoup d’associations adhèrent Á  ce mouvement de lutte contre la violence Á  l’égard des femmes. L’association Enda Océan Indien est allée jusqu’Á  fonder une cellule de veille pour la lutte contre les violences conjugales. Les membres de l’association ont rédigé un manifeste dans lequel beaucoup d’hommes issus des bas quartiers se sont exprimés contre la violence.

Ce manifeste servira de plaidoyer afin d’engager le combat de la lutte contre la violence Á  l’égard de la femme par diverses actions. «Des campagnes de sensibilisation ont été organisées depuis le mois de janvier pour promouvoir la place de la femme dans la société », soutient Amina Amhed, responsable auprès de la cellule de veille. Souhaitons qu’elles portent des fruits…

Fanja Saholiarisoa est journaliste en freelance Á  Madagascar. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.

 


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