Les prêts bancaires en RDC: maigres mais salutaires profits pour les femmes petits entrepreneurs


Date: February 2, 2010
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En effet, caisses d’épargne et crédits, banques de proximité, institutions de micro-finance (IMF) sont désormais aux côtés des opérateurs économiques ou de petits entrepreneurs qui voient plus grand et qui veulent Á  tout prix développer leurs activités.

«Il s’agit de la mise en pratique des résolutions prises en septembre 2000 par les dirigeants du monde Á  divers échelons lors du Sommet du Millénaire et dont la pierre angulaire était l’engagement d’éradiquer la pauvreté d’ici 2015 », souligne Flavie Kingambo Djo, experte en genre.

Le forum sur les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), organisé Á 
Addis-Abeba, Ethiopie, en juin 2002 Á  l’initiative du Programme des Nations Unies pour le Développement, illustre la nécessité de concrétiser l’un de ces OMD, Á  savoir, éliminer l’extrême pauvreté qui affecte en particulier les femmes et la faim, poursuit-elle.

Il y a aussi le Protocole de la SADC sur le Genre et le Développement, signé par la RDC en aoÁ»t 2009, qui stipule dans ses dispositions 15 Á  19 que d’ici 2015, les Etats membres doivent tout mettre en Å“uvre pour que les femmes aient le même accès que les hommes aux ressources productives, Á  l’emploi rémunéré et au renforcement de leurs capacités économiques pour lutter contre la pauvreté.

Bertille Kitembo est une jeune femme d’une trentaine d’années. Elle est mariée et mère de quatre enfants et son dernier a Á  peine deux mois. Cette femme de taille moyenne, couleur d’ébène, Á  l’allure décidée, est un petit opérateur économique qui veut étendre ses activités génératrices de revenus (AGR). Elle a donc opté pour l’accès Á  une source de financement liée Á  la micro finance en vue de mener Á  bien son petit commerce. «Je recours aux petits prêts d’une IMF appelée IMF-Hope/RDC. Il s’agit d’une banque de communauté. Je le fais pour améliorer ma situation financière », souligne-t-elle.

Technicienne en Sciences des Techniques de développement (STD), elle est associée Á  une entreprise d’agro alimentaire nommée «Connie Elubu » (elubu est un mot lingala qui signifie mets succulents et bien traités), appartenant Á  sa sÅ“ur ainée. Bertile Kitembo développe principalement la pâtisserie.

«C’est une activité qui me réussit parfaitement. Elle me procure de bonnes recettes et me fait avancer lentement et sÁ»rement dans les affaires », affirme-t-elle, pleine de satisfaction. Bertille évolue dans cette filière depuis l’époque où elle poursuivait ses études supérieures au sein des Facultés catholiques de Kinshasa, devenues depuis l’Université catholique du Congo (UCC).

«La vente de gaufres, de gâteaux, de cakes, de galettes et de beignets, que je prépare moi-même, m’ont permis de financer mes études tout au long de mon cursus universitaire sans que j’ai eu besoin de recourir Á  l’aide des tiers personnes », explique-t-elle fièrement. Mais elle vend aussi de la charcuterie, de la friperie et d’autres articles qui s’écoulent facilement sur le marché.

«En pâtisserie, je n’ai fait qu’appliquer les techniques apprises au cours de ma formation », explique-t-elle, en rappelant qu’on l’a formée pour créer des emplois et non en être demandeuse. «La pâtisserie fait vivre son homme », assure-t-elle.

Pour Bertille Kitembo, il faut pérenniser ce métier qui a fait d’elle non seulement ce qu’elle est devenue aujourd’hui mais aussi une femme entrepreneur en vue et bien vue. C’est la raison pour laquelle elle n’hésite pas Á  recourir aux petits prêts accordés par des institutions de micro finances.

Elle en est Á  son quatrième cycle d’emprunt. «Je viens d’obtenir au total par rotation, un montant de l’ordre de 910 dollars américains (1USD=900 FC), soit 810.000 FC, Á  raison de 120 dollars US lors du premier cycle, 150 USD au deuxième cycle, 290 dollars US au troisième et 350 au quatrième cycle. Je rembourse cet argent, non sans peine, avec un petit intérêt et dans une échéance raisonnable qui s’étend sur 16 semaines, comme convenu avec la banque », affirme-t-elle.

Elle préfère se tourner vers l’IMF. «L’IMF est moins dure que d’autres institutions qui frappent leurs emprunts de taux d’intérêts allant jusqu’Á  50%. Donc, je préfère m’adresser Á  une IMF où le remboursement a un visage humain et s’effectue par tranches », se réjouit-elle.

Bertile Kitembo accepte les règles établies par l’IMF, y compris la signature d’un document l’engageant Á  utiliser l’argent prêté exclusivement pour son activité commerciale et pas pour ses besoins personnels

Il est aussi demandé Á  l’emprunteur de s’engager Á  «continuer Á  épargner pour l’avenir et Á  constituer une garantie équivalente Á  10% du prêt sollicité après le premier cycle de crédits ».

C’est pour cette raison que la pâtissière Bertille Kitembo n’a d’autre choix que de tout mettre en Å“uvre pour que son commerce prenne de l’essor, pour qu’elle devienne autonome financièrement et ne tombe pas dans la pauvreté.

«Ma banque de communauté ne fait pas de sentimentalisme. En matière de remboursements, elle ne connaît ni maladie, ni deuil ou d’autres empêchements susceptibles de casser le cycle ou la procédure de remboursement. Quelque soit la nature ou l’importance de vos soucis, il faut rembourser le prêt comme convenu, un point, c’est tout », note Bertille Kitembo, qui est obligée de jouer le jeu.

Pour arriver Á  respecter les remboursements, deux conditions sont Á  observer, Á  savoir, s’imposer une discipline de fer dans la gestion des prêts reçus et respecter les échéances convenues en travaillant dur en vue d’accéder aux prêts futurs, estime-t-elle. Bertille Kitembo est consciente des lourdes responsabilités qui pèsent sur ses épaules. Elle tient Á  mériter la confiance de sa banque de communauté qui vient de lui accorder son quatrième cycle de prêt. «J’adopte des stratégies individuelles pour être Á  même d’effectuer tous les remboursements. Je dois donc maximiser mes recettes ».

Bertille Kitembo trouve regrettable que «l’hyper-désarticulation de l’économie de la RDC ait dérouté les bénéficiaires des prêts qui sont en butte aux fluctuations de la monnaie étrangère et du franc congolais. Ce qui défavorise les clients de l’IMF qui ne parviennent pas Á  atteindre leurs objectifs, Á  savoir, réaliser de gros profits ».

Au final, la facilité d’accès au crédit, les conditions associées Á  l’emprunt et le pouvoir d’achat des Congolais pèsent si lourds que leur marge de profits et celle de Bertille Kitembo sont bien maigres, même s’ils arrivent Á  en vivre…

Constance Tekitila Mafuta est journaliste en République Démocratique du Congo. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.

 


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