Les relations entre la presse et les politiques malgaches: une difficile entente


Date: April 27, 2010
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Si Madagascar vit encore dans la tourmente, ce n’est sÁ»rement pas la faute Á  la population. Cependant, celle-ci a eu une part de responsabilité dans la suite des évènements de 2009. En tout cas, le rôle des journalistes a été et reste prépondérant dans le sens où la population s’appuie toujours sur les informations qu’ils diffusent.

Madagascar compte en tout 1001 journalistes inscrits, dont 75% sont des femmes. Avec l’annulation de la censure ou tout simplement l’avènement de la démocratie, le nombre de journalistes travaillant au sein des radios et des télévisions privées, a augmenté de façon importante depuis 1991. Aujourd’hui, Madagascar compte 256 radios et 18 stations de télévision réparties dans toute l’île. Par contre, il n’y a que 17 quotidiens en circulation Á  Antananarivo.

En 2009, il a fallu que le pouvoir instauré par la Haute autorité de la transition ou HAT emprisonne un journaliste employé par l’ancien président Marc Ravalomanana pour que les journalistes se mobilisent enfin et demandent sa libération immédiate et sans conditions.

Les évènements de 2009 ne sont pas le fruit du hasard. Marc Ravalomanana, qui était alors président de la République, avait fait fermer la station VIVA, propriété de l’actuel président de la HAT qui était maire de la capitale Á  l’époque, Á  savoir Andry Rajoelina, qui était dans l’opposition. Et ce, pour avoir diffusé une intervention de l’ancien chef d’Etat malgache, Didier Ratsiraka.

C’est comme cela que tout a commencé. Les journalistes sont devenus des militants, prenant position pour ou contre l’un ou l’autre camp. Il est vrai que les piques se lançaient au niveau des médias mais les journalistes en étaient venus Á  ressembler de plus en plus Á  des vecteurs d’idées partisanes. Le 3 mai 2009, Journée Internationale de la Liberté de la Presse, trois ex-présidents de l’Ordre des Journalistes Malgaches, mouvement aujourd’hui en veilleuse, ont eu mission d’aller de l’avant avec l’élaboration d’un Code de la Communication.

Néanmoins, les déviations ont continué et les politiques ont tout fait pour que des journalistes deviennent les courroies de transmission de leurs idées. A cinq mois de la fin 2009, des journalistes se sont constitués en groupe portant le nom de Collectif des journalistes de Madagascar. Ce groupe a alors pris les «choses » en main.

Pour la première fois, une femme en la personne de Prisca Domoina Rasamoelina, a coordonné les actions du groupe. «Il faut bien que quelqu’un sorte de la mêlée », explique-t-elle. «Et il se trouve que je travaille au sein d’un desk neutre. »

Diverses activités ont été entreprises, Á  savoir la visite de tous les desks pour expliquer les tenants et aboutissants de la création du Collectif. Récemment, soit Á  la mi-avril 2010, ce collectif a pu réunir sous un même toit, des représentants des quatre mouvances politiques qui étaient en plein cÅ“ur de la crise politique, ainsi que des groupes de la société civile, dont justement des journalistes.

Le ministre de la Communication de la HAT, Nathalie Rabe, a bien voulu consacrer trois heures au Collectif. Elle a d’emblée souligné deux points essentiels pour bien informer, Á  savoir le recoupement des informations et leur équilibre. Elle a reconnu que les conditions salariales des journalistes incitent certains Á  leur proposer des «bakchichs » et cela fausse toutes les données. Et dans lequel cas, on ne peut parler d’information objective. Néanmoins, les évènements politiques engendrant des problèmes financiers et sociaux, n’ont fait qu’empirer la situation des journalistes et les ont fait dévier.
«Nous avons Á  réécrire notre histoire », devait expliquer le politique Maurice Beranto, qui se situe dans la mouvance d’Albert Zafy. «C’est tout le système malgache qui est obsolète, pas seulement la pratique journalistique. La réconciliation est aujourd’hui plus que primordiale. Il ne sert plus Á  rien de chercher la cause du dysfonctionnement. »

Faraniaina Pierre Bernard, une femme membre d’une association de la société civile, a expliqué que son association a toujours demandé une transparence dans la gestion des affaires de la HAT. «Nous avons toujours demandé Á  ce que les stations publiques (radio RNM et télévision TVM) soient ouvertes Á  toutes les tendances.

Deux autres femmes politiques, toutes deux présidentes de partis, ont pris la parole. «Cette entreprise du Collectif est plus que courageuse et nous l’encourageons et la félicitons », a dit Lalatiana Ravolomanana de Rempart pour la Solidarité. «Nous savons que vous, les journalistes, travaillez sous le joug de vos patrons. Mais nous vous remercions encore davantage de nous avoir donné, nous dans l’opposition, la parole aujourd’hui. Inconsciemment, vous avez organisé une mini confrontation entre les différentes tendances politiques de la nation. »

Quant Á  Elia Ravelomanantsoa, de «Notre Madagascar », elle a fait un appel Á  la conscience journalistique. «La nation est Á  reconstruire, et vous les journalistes êtes l’un des acteurs de cette reconstruction. »

Finalement, Prisca Domoina Rasamoely, la coordinatrice du Collectif, devait conclure que les activités du Collectif vont se poursuivre en vue de rendre professionnaliser la presse et surtout de la transformer en «confrérie de professionnels de la presse » sachant démontrer son savoir-faire.

Volana Rasoanirainy est journaliste Á  Madagascar Tribune. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.

 


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