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L’hyperactivité sexuelle des jeunes mauriciens est connue de tous, même si la plupart des parents, des enseignants et des responsables politiques du pays préfèrent se voiler la face Á ce sujet. Il est bon de savoir que 55 cas de viols concernant des mineurs ont été rapportés Á la police en 2009, sans compter de nombreux cas de relations sexuelles avec mineures.
Durant la dernière semaine de mai, une adolescente de 13 ans a rapporté Á la police avoir eu des relations sexuelles Á maintes reprises avec son amoureux, dont elle dit ignorer l’âge.
Une autre fille de 12 a connu le pire. Son copain de 18 ans, de même que deux autres habitants de son village, âgés respectivement de 23 ans et 21 ans, auraient eux aussi, eu des relations sexuelles avec elle sur une plage.
Une adolescente de 14 ans, qui était portée manquante, a été retrouvée chez son amoureux de 20 ans, avec qui elle a eu des relations sexuelles au Champ de Mars le 20 mai dernier.
Selon la psychologue Emilie Duval, les activités sexuelles, la consommation d’alcool et de drogue sont les réalités de beaucoup de jeunes d’aujourd’hui. Si le développement physique est précoce chez les adolescents, tel n’est pas le cas pour leur développement psychologique. Ils ne sont pas préparés aux conséquences de leurs actes.
Le syndicat des enseignants du primaire, la Governement Teachers Union (GTU), a décidé de prendre les choses en main, vu que l’adolescente violée de Flacq avait fait l’école buissonnière le jour de son agression sexuelle. En collaboration avec la Mauritius Family Planning and Welfare Association (MFPWA), association chargée du planning familial Á Maurice, l’exécutif de ce syndicat s’est lancé dans une session de formation de trois jours Á l’intention de tous les enseignants du primaire. L’objectif était de faire de la prévention contre le VIH/SIDA.
Selon Vinod Seegum, le président de la GTU, «avec la propagation du VIH/SIDA, il incombe au syndicat de former les enseignants pour qu’Á leur tour, ils sensibilisent leurs élèves Á cet effet, d’autant plus qu’il n’existe pas encore une politique d’éducation sexuelle dans le cursus scolaire ».
Vidya Charan, la directrice de la MFPWA, pense qu’il faut attaquer le mal Á sa racine. «Ces enfants se laissent guider par leurs pulsions. On les juge et les condamne sans toutefois comprendre leur situation. Ils ne disposent pas d’informations et d’encadrement adéquats pour leur permettre de faire des choix responsables », fait-elle ressortir.
Rita Venkatasamy, directrice du Centre d’Education et de Développement des Enfants mauriciens (CEDEM), remet elle aussi sur le tapis la question d’éducation sexuelle dans le cursus scolaire. «C’est le grand problème. Tant au niveau de l’éducation primaire que secondaire, il y a une grosse lacune concernant l’éducation sexuelle. Il faut un débat assez ouvert et sans tabou sur la sexualité. Les jeunes ne réalisent pas quels dangers et pièges les attendent lorsqu’ils ont une sexualité précoce », dit-elle.
Plusieurs organismes veulent intervenir sur ce dossier Á condition qu’il n’y ait pas de tabou ou d’interdits. A titre d’exemple, en 2009, le ministère de la Santé a pris sur lui pour faire interdire trois questions touchant Á la sexualité, l’abus d’alcool dans le monde estudiantin et le VIH/SIDA dans le cadre d’un sondage de l’Organisation Mondiale de la Santé mené auprès de jeunes de 13 Á 15 ans.
Cette intervention avait irritée le Premier ministre, Navin Ramgoolam, d’autant que d’autres pays plus conservateurs que Maurice, comme l’Indonésie par exemple, avaient permis Á tous les étudiants de la tranche d’âge ciblée de répondre Á toutes les questions du sondage de l’OMS, y compris celles portant sur leur sexualité et leur utilisation des méthodes contraceptives, dont le préservatif.
De plus, la distribution des pamphlets par l’organisation non-gouvernementale Prévention, Information et Lutte contre le Sida (P.I.L.S), qui milite contre la propagation du VIH/SIDA, avait été interdite lors d’une foire éducationnelle.
Une interdiction qui avait été très critiquée par Rajni Lallah, secrétaire du Muvman Liberasyon Fam (MLF). «L’affaire des questions amputées du sondage de l’OMS et l’interdiction de distribution des pamphlets de P.I.L.S démontrent qu’il y a une répression sexuelle de l’Etat dans ce pays », a-t-elle affirmé.
La prise de risques est une des caractéristiques de l’adolescence. Toutefois, il est important de pouvoir aider les jeunes Á évaluer les prises de risques et leurs conséquences, et de pouvoir mettre en place des balises et des garde-fous qui soient clairs. C’est comme un pont menant de l’adolescence au monde adulte. Sans rambardes, l’adolescent peut glisser, chuter et se faire très mal. Il appartient aux parents, au ministère de l’Education et Á l’Etat de placer ces rambardes.
Jimmy Jean-Louis est journaliste Á Maurice. Cet article fait partie du service d’opinions et de commentaires de Gender Links qui apporte des perspectives nouvelles Á l’actualité quotidienne.
Comment on L’hyperactivité sexuelle des jeunes mauriciens inquiète