Pont entre Kinshasa et Brazzaville : les femmes d’affaires kinoises applaudissent


Date: April 6, 2010
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La réalisation d’un pont route-rail entre Brazzaville et Kinshasa ne relève plus de la simple fiction car un protocole d’entente a été signé l’an dernier entre les ministres du Plan de la République Démocratique du Congo et du Congo/Brazzaville.

Si dans les milieux politiques de Kinshasa, l’événement suscite de vives polémiques, par contre, la satisfaction est Á  son comble dans le monde des affaires. Les femmes d’affaires kinoises accueillent chaleureusement la nouvelle.

«Depuis longtemps, nous attendons la concrétisation de ce projet, car, ce pont va sensiblement améliorer notre performance en donnant une nouvelle impulsion Á  l’activité commerciale des femmes commerçantes entre Kinshasa et Brazzaville », estime Francisca Muswamba de l’Association des femmes commerçantes du Congo (AMACO).

En effet, entre les deux capitales les plus rapprochées du monde, les échanges commerciaux sont très intenses. Il suffit d’être Á  Beatch Ngobila (port de Kinshasa) ou Á  celui de Brazzaville pour s’en convaincre.

A chaque accostage, de part et d’autre du fleuve, pas moins de 2000 personnes débarquent du bac, traînant dans des chariots toutes sortes de marchandises. Ce commerce est exercé surtout par un grand nombre de femmes. Battantes, courageuses, téméraires, elles ont la ferme volonté de gagner leur vie par leur travail.

« Nous avons toujours rêvé d’avoir ce pont entre Kinshasa et Brazzaville car, la traversée chaque jour par bac est pour nous un calvaire, un parcours du combattant. Aller Á  Brazzaville exige de nous beaucoup de sacrifices. Nous sommes soumises Á  de multiples taxes fantaisistes infligées par des nombreux services de l’Etat, qui pullulent Á  Beatch Ngobila. A cela, s’ajoutent les tracasseries policières », raconte Sidonie Mulenda, une «maman commerçante » qui fait état, par ailleurs, du fait que les femmes soient bastonnées.

«Celles qui refusent de donner le kanyaka (pot de vin) se voient confisquer leurs marchandises. Les plus récalcitrantes sont bastonnées et jetées au cachot », renchérit Charlotte Bibwa, également femme d’affaires, qui s’apprête Á  faire la traversée jusqu’Á  Brazzaville. «Mieux vaut traverser le chat d’une aiguille que d’aller Á  Brazzaville en passant par le Beatch Ngobila. Mais jusqu’Á  présent, nous n’avons pas le choix », souligne ZaÁ¯na Madiya, une autre femme commerçante de Kinshasa.

C’est la raison pour laquelle les différentes associations de femmes commerçantes de Kinshasa saluent chaleureusement la signature du protocole d’entente signé entre les deux Congo pour la réalisation d’un pont route-rail entre Brazzaville et Kinshasa. C’est ce qu’a indiqué la présidente du Réseau des Femmes Leaders des Petites et Moyennes Entreprises (RFL-PME), Flavie Djo.

«Avec ce pont, les conditions de déplacement entre Kinshasa et Brazzaville seront sÁ»rement plus aisées et permettront aux commerçantes d’exercer leur métier sans stress. Avec le pont, finies les tracasseries policières et les autres problèmes en tout genre dont les femmes commerçantes étaient victimes Á  longueur de journées Á  Ngobila. Fini le règne du « kanyaka », affirme Florentine Kahemba, commerçante et membre de l’Association des femmes commerçantes (AMACO).

Selon Véronique Manjo, femme d’affaires, membre de l’association dénommée «Muziki 100 kilos », «le pont va beaucoup nous avantager car, nous n’allons plus nous limiter comme d’habitude Á  ne faire des affaires qu’Á  Brazzaville. Nous serons tentées de pousser jusqu’Á  Pointe Noire, port congolais sur l’Atlantique, où les marchandises dédouanées sont moins chères que celles qui entrent par le port de Matadi en RDC. Avec le pont, chacune de nous, selon ses moyens, peut ramener une plus grande quantité de marchandises. La traversée par bac nous limitait sur ce plan ».

Charlotte Muzongo, commerçante générale, parle du pont comme d’un facteur d’intégration régionale par excellence. «En effet, nous pourrons atteindre facilement et Á  peu de frais, par route, le Gabon, le Cameroun, le Nigeria, pour prospecter dans les pays de la sous-région d’Afrique centrale. Grâce Á  ce pont, nous pourrons Á  l’avenir et toujours par route, atteindre les marchés de l’Afrique de l’ouest, notamment le Togo et la Côte d’Ivoire, des lignes que nous exploitons jusqu’ici par voies aériennes et qui nous coÁ»tent très chères ».

L’étroitesse de l’espace géographique du Congo/Brazzaville, sa faible population et son trafic interne de marchandises très limité ont de tout temps rendu déficitaire la ligne de chemin de fer Congo Océan (Société congolaise de chemin de fer) entre le port de Pointe-Noire et Brazzaville, même avec l’apport de marchandises en provenance ou en partance de la République Centrafricaine (RCA).

VoilÁ  pourquoi Brazzaville se tourne vers Kinshasa qui représente avec toutes ses provinces en amont un potentiel considérable pouvant largement combler la différence manquante pour une exploitation rentable de la ligne de chemin de fer Congo Océan et, partant, contribuer Á  soutenir durablement toute l’économie du Congo/Brazzaville.

Grâce Á  ce projet, Kinshasa sera relié au Congo Brazzaville, qui est connecté au Cameroun se prolongeant ainsi vers l’Afrique de l’ouest, avec tous les avantages que cela implique en termes d’intégration économique.

Ainsi, le projet de la réalisation d’un pont route-rail entre Brazzaville et Kinshasa, qui est extrêmement ambitieux, pourra s’avérer très bénéfique aux femmes d’affaires congolaises, qui verront leurs activités commerciales prendre de plus en plus d’ampleur et connaître une nouvelle impulsion, indique Eliane Munkeni, expert-comptable, et seule femme congolaise Á  avoir un cabinet fiduciaire Á  Kinshasa.

Comme quoi, le pont route-rail entre Brazzaville et Kinshasa laisse présager qu’il sera un facteur déterminant d’intégration économique pour les femmes congolaises.

Urbain Saka-Saka Sakwe est journaliste en République Démocratique du Congo. Cet article fait partie du service de commentaires et d’opinions de Gender Links.

 


One thought on “Pont entre Kinshasa et Brazzaville : les femmes d’affaires kinoises applaudissent”

Pierre Louis Herns says:

I want to see black women, cause they always fight to their families

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